L'Express (France)

Où placer au mieux ses liquidités

Depuis la crise, les comptes courants des Français débordent. Pour éviter de laisser dormir son épargne, il existe plusieurs solutions.

- PAR MARIE PELLEFIGUE

Avec la crise du Covid-19, les épargnants ont recouvré de vieux réflexes : ils ont limité leurs dépenses et thésaurisé. A tel point que ces six derniers mois l’épargne de précaution a bondi à des niveaux historique­s. « De début janvier à la fin juillet, les Français ont accumulé 63 milliards d’euros supplément­aires sur leurs comptes courants », souligne Cyril Blesson, cofondateu­r des Cahiers de l’épargne. Des sommes qui ne rapportent rien, voire font perdre du pouvoir d’achat, puisque, selon l’Insee, en août 2020, le taux d’inflation était de +0,2 % sur les douze derniers mois glissants. Ce réflexe d’écureuil est mû par la crainte de la récession économique à venir. La crise sanitaire est loin d’être finie. Le spectre du chômage, doublé d’une conjonctur­e financière compliquée, explique que les Français préfèrent mettre de l’argent de côté, sans même tenter de le faire fructifier.

Bâtir une nouvelle stratégie pour son patrimoine est essentiel. A commencer par l’épargne de précaution, qui ne devrait pas dépasser six mois de salaires ou de loyers, sauf si l’on a un projet précis (achat d’un logement…) à très court terme. On peut ensuite la compléter avec des produits de moyen terme qui permettent de retirer facilement son argent. Enfin, pour les plus audacieux, les périodes de crise sont en général adaptées aux belles opportunit­és, sans mettre en péril la sécurité. Bref, brique après brique, il est aujourd’hui possible de construire un patrimoine solide qui pourra vous protéger en cas de problème. Le mieux est d’agir dès maintenant plutôt que de laisser votre argent végéter sur un compte courant.

Pour les liquidités, la première famille de placements à ouvrir est celle des livrets réglementé­s : le Livret A et son cousin le livret de développem­ent durable et solidaire (LDDS). Très souples, ils rapportent chacun 0,5 % net, et les fonds y sont disponible­s à tout moment. « L’argent déposé est garanti et ne court donc aucun risque. De plus, les intérêts sont totalement exonérés de taxation », explique Jean-Baptiste Roudillon, directeur épargne chez LCL. Attention, il n’est possible de détenir qu’un seul Livret A et LDDS par personne, les deux étant cumulables et les versements y étant plafonnés respective­ment à 22 950 et à 12 000 euros. Pour faire mieux, si vos revenus imposables ne dépassent pas un certain montant (19 977 euros déclarés en 2018 pour un célibatair­e), vous pouvez ouvrir un livret d’épargne populaire (LEP). « Il permet d’obtenir un rendement

Les banques des constructe­urs automobile­s proposent des livrets boostés

de 1 % net, mais les versements y sont plafonnés à 7 700 euros », rappelle JeanBaptis­te Roudillon. Le LEP est cumulable avec un Livret A et un LDDS. A savoir : votre épargne sera rémunérée à partir de la quinzaine qui suit le dépôt. Pour optimiser vos intérêts, effectuez plutôt vos versements le 15 ou le 30 du mois, et vos retraits le 1er ou le 16 de chaque mois.

Si vous avez déjà saturé les plafonds de versements et voulez épargner davantage, vous pouvez souscrire à un super livret bancaire. Ces placements fonctionne­nt comme les précédents : l’argent y est garanti à 100 %, dans certaines limites (voir l’article Que se passerait-il si votre banque faisait faillite, page V), et vous pouvez y verser et retirer de l’argent librement, sans frais. Seules différence­s : leurs plafonds de versement sont très élevés et leurs intérêts fiscalisés. Inutile d’attendre des offres promotionn­elles en cette période de vaches maigres. « Comme les comptes à vue débordent, les banques ne sont pas en manque de liquidités, les super livrets à taux dopés ne risquent donc pas de revenir », assure Cyril Blesson. Aujourd’hui, ils offrent entre 0,05 % et 0,2 % brut (soit 0,035 et 0,14 % net, moins que l’inflation). Pour trouver mieux, il faut se tourner vers les banques des constructe­urs automobile­s nationaux. « Elles font des crédits aux particulie­rs pour financer l’achat de véhicules. Elles cherchent donc des ressources et les trouvent via des livrets boostés », relève-t-il. Les Livrets Distingo (PSA Banque) ou Zesto (RCI, groupe Renault) rémunèrent l’épargne à 0,8 % brut (0,56 % net), soit légèrement mieux que le Livret A.

Si vous êtes prêts à bloquer votre argent plus longtemps, le Plan d’épargne logement (PEL) est une option intéressan­te. Ce placement garantit le capital et offre un rendement de 1 % brut (0,7 % net) dans la limite de 61 200 euros de versements. Il impose de verser au minimun 540 euros par an et d’attendre quatre ans pour récupérer son épargne. Mais peu de banques précisent à leurs clients que le taux de rémunérati­on est garanti au bout de deux ans (tout retrait avant cette date le fait chuter à 0,25 % brut). L’autre solution, pour ceux qui ont conservé leur PEL d’une génération plus ancienne, donc plus rentable, est d’y investir leur épargne. A condition que le PEL ait moins de dix ans, il est possible

d’y effectuer des versements complément­aires. Cela permet de profiter d’une rémunérati­on plus forte, par exemple 2,5 % brut (2,07 % après prélèvemen­ts sociaux) pour les PEL ouverts avant le 31 janvier 2015. Même si les intérêts sont imposables à partir du douzième anniversai­re du plan, la rémunérati­on de ces produits est imbattable. Mais, attention : tout retrait entraîne leur fermeture, raison pour laquelle il ne faut pas y investir son épargne liquide.

Enfin, la dernière piste pour placer de l’argent sans risque est le fonds en euros d’un contrat d’assurance-vie. Ce placement bénéficie aussi d’une garantie à 100 % du capital. Néanmoins, vu la faiblesse actuelle des taux d’intérêt, le rendement n’est plus extraordin­aire. En moyenne, il offrira 1,2 à 1,3 % brut cette année, certains contrats très performant­s frisant les 2 %. Pour que le choix soit fructueux, examinez les frais d’entrée qui grignotent les gains. Mais n’éliminez pas à l’aveugle tous les contrats qui en facturent, car certains sont intéressan­ts. « Il faut comparer le niveau des frais et la performanc­e du fonds en euros », glisse Olivier Sénéchal, conseiller en gestion de patrimoine chez OSL, à Caen. Les retraits sont possibles à tout moment mais fiscalisés, la taxation dépendant de la date d’ouverture du contrat, de celle des versements et du montant des retraits (voir l’article Assurance-vie : à la recherche du rendement perdu, page VI). Aussi, évitez les allers-retours sur ce type de placement car, même avec une fiscalité allégée, vous y perdriez beaucoup.

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