ISR : le bon filon de la finance durable
Les investissements « responsables » affichent de meilleures résultats que les autres selon plusieurs études. Raison de plus pour s’y intéresser.
La vertu paie ! La finance durable a marqué des points à l’occasion du choc boursier provoqué par la pandémie de Covid-19. Les fonds étiquetés ISR, pour investissement socialement responsable, ont mieux résisté au krach que les fonds conventionnels, et s’en sont relevés avec plus de vigueur. L’ISR ? Un mode de sélection des sociétés composant le portefeuille d’un fonds (Sicav, par exemple), non seulement sur la base des habituels paramètres financiers, mais également au vu de critères dits extrafinanciers. Il s’agit de données concernant la stratégie des entreprises, les impacts environnementaux et sociaux de leurs activités, et leur gouvernance (données dites ESG).
« La résilience des fonds durables quand les marchés financiers sont orientés à la baisse s’est confirmée : leur performance moyenne est de – 5,2 % au premier semestre, toutes classes d’actifs confondues hors monétaire. Les fonds d’actions ont, par exemple, enregistré une performance moyenne nette de – 6,5 % sur la période alors que le CAC 40 a perdu 17,5 % », confirme Novethic, filiale de la Caisse des dépôts, dans un rapport de juin 2020.
Cette capacité de résistance s’expliquerait notamment par le positionnement sectoriel de ces placements. « Ils ont davantage investi dans des secteurs ayant mieux résisté, tels que la Tech ou la santé, et moins dans ceux qui ont été les plus sanctionnés par les places boursières, les transports, les matières premières ou les sociétés financières », analyse Adrienne Horel-Pagès, directrice des projets stratégiques à la Banque postale asset management.
Plusieurs études tendent, toutefois, à montrer que les entreprises vertueuses battaient déjà leurs concurrentes avant la crise. Après avoir épluché les résultats en Bourse de 1 700 entreprises, Amundi AM souligne dans un rapport publié en janvier 2020 qu’un portefeuille qui aurait sélectionné les 20 % d’actions les mieux notées au regard des critères ESG et rejeté les 20 % les moins bien classées « aurait généré un rendement annualisé de 6,6 % dans la zone euro sur la période 2014-2017, soit deux fois plus que l’indice Euro Stoxx 50. »
Le constat est similaire chez la Financière de l’Echiquier, qui a comparé les résultats boursiers des bons élèves de la classe ESG à celle des cancres parmi les quelque 700 sociétés composant son univers d’investissement. « Cette étude a confirmé quantitativement nos intuitions et observations empiriques préalables, mais avec des résultats étonnants par l’ampleur des écarts de performance qu’ils ont révélée : au premier trimestre 2020, les sociétés les mieux notées sur les critères ESG affichent des performances sur dix ans 3,8 fois supérieures à celles des plus mal notées », commente Luc Olivier, gérant.
Cet avantage des fonds ISR tiendrait à une meilleure appréciation des risques pesant sur les entreprises qu’ils ont tendance à privilégier, notamment sur le plan environnemental. Le handicap de certains groupes dans la transition énergétique commence à se muer en difficultés financières futures dans l’esprit des gérants. « Il y a dix ans, personne ne se souciait des perspectives négatives auxquelles les compagnies pétrolières étaient exposées. Aujourd’hui, ces groupes provisionnent des milliards de dollars de réserves pour anticiper la fonte prévisible de leurs ressources premières, dont une part devra rester confinée dans le sous-sol pour que soient atteints les objectifs de réduction d’émission de carbone fixés par l’accord de Paris dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique », observe François Lett, directeur « gestion éthique et solidaire » chez Ecofi.
Néanmoins, la question des performances de l’ISR est sujette à débat. « Les analyses portent une période définie, pouvant correspondre à un contexte particulier. Les méta-études qui analysent, elles, les performances à plus long terme aboutissent à des résultats non conclusifs », nuance Adrienne Horel-Pagès. Reste que, l’ISR prenant une part croissante dans les politiques d’investissement des sociétés de gestion au niveau mondial, l’achat des titres les mieux classés sur les critères ESG suit une courbe ascendante, « ce qui a pour effet, selon François Lett, de tirer mécaniquement leurs cours à la hausse ». C’est sans doute le meilleur argument pour inciter les sociétés cotées à progresser sur la voie de l’ISR.
« Ces fonds ont investi dans les secteurs qui ont le mieux résisté, tels que la Tech ou la santé »