L'Express (France)

Erdogan, l’« allié » de plus en plus encombrant de Poutine

En s’invitant dans le conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdja­n, Ankara veut accroître son influence locale. Au grand dam de Moscou.

- PAR CYRILLE PLUYETTE

Après la Syrie et la Libye, le Haut-Karabakh : Vladimir Poutine est de nouveau confronté à l’implicatio­n militaire de son homologue turc dans une de ses zones d’influence. Comment le maître du Kremlin va-t-il réagir face à ce partenaire imprévisib­le ? Depuis vingt-six ans, Poutine joue les arbitres dans le conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdja­n, qui se disputent ce territoire du Caucase du Sud majoritair­ement peuplé d’Arméniens. La Russie entretient à la fois de bonnes relations avec Erevan, son allié militaire, et Bakou, elle aussi capitale d’une ancienne république d’URSS. Mais voilà qu’Erdogan, qui soutient le régime azerbaïdja­nais, a envoyé des centaines de mercenaire­s syriens – qualifiés de « djihadiste­s » par Emmanuel Macron – sur le front rouvert fin septembre.

Poutine pourrait, en tant que membre du groupe de Minsk – coprésidé par les Etats-Unis, la France et la Russie, et visant un règlement pacifique au Haut-Karabakh – chercher à freiner la Turquie. « Mais il s’expose à des provocatio­ns d’Ankara ailleurs », souligne le politologu­e Gaïdz Minassian. Et s’il laisse faire Erdogan, il prend le risque de le voir devenir incontrôla­ble. En réalité, Poutine s’accommoder­ait d’un affaibliss­ement de l’Arménie, dans le cadre d’une guerre limitée au Haut-Karabakh, qui lui permettrai­t d’accroître son emprise sur ce pays. Surtout, selon Gaïdz Minassian, les deux autocrates « pourraient s’entendre en Syrie ou en Libye pour débloquer la situation au Caucase, ou inversemen­t ». Avec un objectif commun : exclure l’Occident de ces trois théâtres.

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