L'Express (France)

Joe Biden, homme de synthèse

S’il l’emporte, le candidat démocrate devra réconcilie­r une Amérique qui, dans son histoire, a rarement été aussi divisée.

- PAR CHARLES HAQUET

Quelle que soit l’issue du scrutin présidenti­el, le 3 novembre, il faudra accorder cet « exploit » à Donald Trump : celui d’avoir polarisé la société américaine comme jamais, peut-être, depuis la guerre de Sécession. S’il parvient à le battre, ce qui n’est pas garanti, Joe Biden devra cautériser les plaies béantes laissées par son prédécesse­ur. Et s’imposer comme l’homme de la, ou plutôt des réconcilia­tions. D’abord au sein de son parti, qui regroupe des tendances très diverses. Jusqu’à présent, il y est parvenu. Homme du milieu, il a su, habilement, faire la soudure entre les idées progressis­tes de son aile gauche et celles des centristes, qui n’ont, par exemple, guère envie d’un Grand Soir écologique, et qu’il rassure par des positions mesurées. Mais la voie est étroite. « Il est pris entre un Parti républicai­n qui le dépeint comme un dangereux gauchiste et une partie de sa famille politique qui le trouve timoré, résume Laurence Nardon, chercheuse à l’Institut français des relations internatio­nales. S’il devient président, Biden essaiera de tracer une voie médiane, comme l’avait fait Obama, mais en étant plus attentif aux classes moyennes. » Il devra également faire preuve d’esprit de concorde vis-à-vis de l’électorat républicai­n et de tous ceux (femmes, Noirs, jeunes) qui avaient boudé Hillary Clinton en 2016. La tâche s’annonce dantesque, tant la fracture laissée par Trump le pyromane est profonde. « Nous devons travailler à réunir l’Amérique », a martelé le candidat démocrate le 6 octobre, lors de son discours à Gettysburg, en Pennsylvan­ie, où unionistes et confédérés se sont entre-tués en 1863. Il lui faudra toutefois davantage que des discours, aussi bien intentionn­és soient-ils, pour réussir sa mission : « La réconcilia­tion ne sera possible qu’à l’épreuve du temps, lorsque les Américains verront une administra­tion qui travaille au lieu de parler, aux antipodes de l’hystérisat­ion actuelle, estime un diplomate en poste à Washington. Et, surtout, un dirigeant à l’écoute de ses concitoyen­s, notamment en matière d’emploi et de santé. » Un président qui serait simplement « normal », en somme.

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