Quand la Bourse devient morale
amont. «C’est complètement faux», rétorque-t-on chez Eau de Paris, où l’on brandit les 475 millions d’euros investis entre 2014 et 2020, « nettement plus que les anciens concessionnaires ». Loin de la bataille boursière de Paris, Antoine Frérot pourrait avoir déclenché les grandes manoeuvres de l’eau dans les territoires.
Un nombre croissant d’actionnaires renoncent à investir dans des secteurs, pourtant très juteux, comme l’alcool, le tabac, et maintenant le pétrole.
EWt si l’argent avait finalement une odeur ? Encore très marginale il y a quelques années, cette idée s’est fortement développée sur les marchés financiers. Même au-delà des cercles d’investisseurs engagés. A Wall Street, et dans un nombre croissant de grands fonds, les actionnaires ne veulent plus financer n’importe quoi, n’importe où et n’importe comment. Le gain oui, mais pas à n’importe quel prix !
Cette tendance n’est pas nouvelle. Déjà, dans les années 1990, certains actionnaires appelaient à investir dans les « bonnes » sociétés, celles qui produisent utile, et à éviter les « sin stocks », ces actions des entreprises « du péché », liées à l’alcool, à la malbouffe, au tabac, ou même à l’industrie du X. « Vendre des cigarettes n’est pas une activité neutre », reconnaît un gestionnaire de fonds. Cette inclination demeurait toutefois rare au regard des milliards de dollars de titres placés dans McDonald’s ou British American Tobacco… A l’époque, les principaux investisseurs « responsables » n’étaient autres que des organisations religieuses, aux moyens forcément limités.
Mais le mouvement s’est progressivement intensifié sous l’impulsion, notamment, de certains grands noms plus écoutés. Et, évidemment, plus puissants, à l’instar du fonds souverain norvégien, qui est également le plus gros actionnaire de la planète. Assis sur une montagne de plus de 1 000 milliards de dollars d’actifs, le géant européen a assez vite annoncé la couleur : fini les placements dans les secteurs dont l’impact est « négatif » pour la planète et la société. Depuis, tout le monde s’y met avec des labels « socialement
responsables ». C’est à qui criera le plus fort qu’il sortira de telle ou telle industrie.
La liste des « sin stocks » ne cesse d’ailleurs de s’allonger et dépasse aujourd’hui largement le cadre de l’alcool, des cigarettes et des fusils d’assaut. Les énergies fossiles, pétrole en tête, sont dans le viseur de certains actionnaires qui menacent de se retirer de Shell et de Total si l’industrie n’investit pas dans le renouvelable. D’autres domaines, comme l’automobile, sont également dans la tourmente, alors que l’écologie est devenue un sujet incontournable. « Ça peut aller très très loin comme ça, s’amuse un trader. Tous les secteurs vont être touchés les uns après les autres. »
Reste que le pari n’est pas simple. Car ces entreprises « immorales », qui représentent des dizaines de millions d’emplois rapportent gros aux investisseurs. Pendant la crise, des groupes comme Brown-Forman (le whisky Jack Daniel’s, notamment) ont vu leur action progresser de plus de 10 %, alors que les Bourses chutaient fortement. Et pour cause : même confinés, les gens continuent de fumer, de boire, de manger, ou de parier en ligne…
W« dropshipper »
produit différent de celui qui était affiché. « Les arnaques augmentent sans cesse », reconnaît-on du côté de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).
Depuis le début de l’année, il y en a déjà eu des centaines en France. La balance connectée FitTrack en est peut-être d’ailleurs la plus belle illustration. Vendue plus de 80 euros par la société du même nom, elle était disponible sur d’autres sites à des prix 5 ou 6 fois inférieurs… Une entourloupe assez vite repérée par des internautes, mais qui a quand même eu le temps de faire pas mal de dégâts. « C’est un marché compliqué à surveiller, parce qu’il est mondial », souligne un représentant de la DGCCRF. Et encore très sauvage.
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clients. Etonnamment, « personne ne nous a demandé de démarcher les entreprises dans lesquelles nous avons pris des parts », assure un salarié de Tencent Cloud. Ce que confirme également la start-up de jeux pour mobiles Voodoo, dernier acteur tricolore soutenu par la société de Pony Ma. A l’origine, avec différents studios, de la création de plus de 150 titres pour smartphone (Paper.io, Helix Jump…), l’éditeur utilise la solution d’Amazon, AWS. Et non celle de son partenaire chinois.
Il compte en revanche s’appuyer sur lui pour se lancer à l’assaut de l’Asie en adaptant son catalogue aux goûts locaux, avec davantage de couleurs et des designs modifiés… Son cofondateur, Alexandre Yazdi, n’a jamais rencontré ses interlocuteurs asiatiques en face à face, toutes les discussions se sont faites par visioconférence. Les négociations se sont tenues avec James Mitchell, directeur de la stratégie de Tencent et ancien analyste de Goldman Sachs, et Lincoln Yeh, directeur des investissements.
« D’ici à trois ans, le groupe pourrait acquérir en totalité certaines start-up »
Actuellement, il n’est pas encore question de développer des jeux pour leur célèbre messagerie WeChat, mais l’évolution semble naturelle puisque Voodoo le fait déjà avec leur concurrent Line au Japon.
Signe que le président de Tencent cherche à accélérer sa stratégie de conquête du monde, il a récemment affirmé vouloir communiquer et coopérer davantage avec sa galaxie d’entrepreneurs. Une réponse aux critiques sur sa ligne de conduite, jugée plus proche de celle d’un fonds de capital-risque que d’un industriel menant une stratégie claire. « Ce groupe prend son temps avant d’agir, estime Mikaël Ptachek. Mais d’ici à deux ou trois ans, il pourrait acquérir en totalité certaines start-up dans lesquelles il a déjà investi et prendre ainsi un avantage décisif à l’international. » Avec plus de 800 noms dans son portefeuille, Tencent n’a que l’embarras du choix. Reste à savoir quand et où il frappera en premier.
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