La reconnaissance faciale débarque dans les aéroports français
A Lyon, Vinci Airports vient d’inaugurer son nouveau service de biométrie. Objectif : diminuer de trente minutes le temps de parcours de contrôle des voyageurs.
Voici Mona, la petite dernière de la sécurité aéroportuaire. En un clin d’oeil, elle ouvre les portes des points de contrôle, du comptoir de dépose bagage jusqu’à la passerelle d’embarquement. Mona a ces pouvoirs magiques de l’intelligence artificielle, qui, avec une simple petite caméra, peut comparer votre visage à celui de la pièce d’identité que vous avez enregistrée dans l’application de l’aéroport. Dans un premier temps, ce nouveau service de reconnaissance faciale sur tout le parcours du passager sera disponible sur deux compagnies au départ de Lyon-Saint-Exupéry : Transavia et TAP Air Portugal. « Une innovation mondiale », selon Nicolas Notebaert, président de Vinci Airports, qui pilote l’aérogare depuis 2016.
Avec Mona, le voyageur n’a plus besoin de sortir sa pièce d’identité ni sa carte d’embarquement. « L’idée, c’est d’avoir un temps optimisé au sein de l’aéroport. En utilisant la biométrie et la reconnaissance faciale, le passager va gagner trente minutes dans les différentes files d’attente », se félicite le « M. Concession » de Vinci, qui espère déployer en 2021 un système similaire dans les aéroports qu’il gère, notamment à Lisbonne et à Porto. Le temps économisé par le voyageur pourra être mis à profit pour se relaxer avant le décollage. Ou pour flâner dans les boutiques et les restaurants, qui constituent une des sources majeures de revenus pour l’aéroport.
Dans l’aérien, chaque acteur doit prendre sa part pour retisser la confiance. Les compagnies martèlent leur discours sur la sécurité sanitaire à bord. Les gestionnaires d’aéroports cherchent, eux, des solutions techniques pour fluidifier les flux. « Il faut lever les barrières psychologiques à des moments clef du parcours, notamment lors de l’inspection-filtrage », fait-on valoir chez Vinci Airports. C’est en effet là que se concentrent les appréhensions. En utilisant Mona, le voyageur peut passer par le portique biométrique et couper la file en un coup d’oeil. Face au tapis roulant de la machine à rayons X, l’agent de sécurité ne demande plus la carte d’embarquement mais invite le passager à regarder un petit écran. L’appareil donne alors son feu vert pour que ce dernier franchisse le portique.
Seule subtilité, le parcours sans contact nécessite parfois de toucher l’écran, en particulier dans les petits espaces. « C’est une demande de la Cnil [Commission nationale de l’informatique et des libertés]. Comme la caméra peut filmer en permanence, cette action manuelle donne le feu vert au contrôle et matérialise le consentement du client », précise Tanguy Bertolus, président d’Aéroports de Lyon. En effet, lorsque l’appareil est installé dans un hall d’accueil ou dans un endroit assez large, le logiciel est en mesure de flouter l’arrière-plan pour ne capter que le visage de l’intéressé. Mais dans des lieux plus petits, avec moins de profondeur, une action volontaire est requise pour déclencher l’optique.
Afin de mener à bien son projet, Vinci s’est appuyé sur la technologie de plusieurs entreprises : Idemia pour la solution biométrique, Atipik pour l’application mobile, Salesforce et Viseo pour le logiciel de gestion des contenus. Un budget de « quelques centaines de milliers d’euros », précise Nicolas Notebaert, qui certifie que les données sont détruites après le décollage de l’avion. « En France, ce type d’expérimentation est toujours compliqué, car la Cnil se montre intransigeante sur certains détails du service », explique un spécialiste du secteur aérien. C’est d’ailleurs tout le paradoxe de la biométrie : si elle facilite les parcours sans contact et fait gagner du temps aux passagers, elle provoque souvent des blocages au nom du respect de la vie privée. ✷
« Il faut lever les barrières psychologiques, notamment lors de l’inspection-filtrage »