Laurent Gaudé, Marcia Burnier, Michel Feltin-Palas
On pourrait être broyé par cette palette d’impossibles réparations. Mais ce roman, tant écrit sur le vif au point d’en devenir parfois confus, est porté par un souffle électrique, orageux. A l’image de ce qui unit ses héroïnes : la rage. Lucie, Mia, Leo, Inès, Lila, Nina et Louise décident de renverser l’ordre établi de la peur et de la honte. Elles n’érigent pas ce qu’elles font en système. Elles agissent. Ensemble, elles ravagent l’appartement de l’un de leurs agresseurs ou forcent un autre à écrire des aveux. « On ne dit pas vengeance, c’est pas la même chose, là on se répare, on se rend justice parce que personne d’autre n’est capable de le faire », explique l’une d’elles. Ici, la résilience ne passe pas par le pardon ou l’oubli, mais par une sororité tapageuse qui, autant que leurs actions, les libère. Les corps se redressent. Les rires jaillissent. La collection « Sorcières » de Cambourakis s’ouvre à la fiction avec ce bouillonnant roman. On comprend pourquoi.
LE FRANÇAIS, UNE SI FABULEUSE HISTOIRE !
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La formation d’une langue n’a rien d’un long fleuve tranquille. Emaillée d’embûches, bruissante de conquêtes militaires, riche en personnalités flamboyantes et en combats homériques, l’étude de l’histoire du français tient à la fois du roman national, d’un traité sociologique et d’un récit à suspense. C’est en tout cas ainsi que Michel Feltin-Palas, journaliste à L’Express, nous la présente, avec, « cerises sur le gâteau », un sens de la pédagogie affirmé et un bouquet d’exemples édifiants. Pour résumer, on pourrait dire, comme l’auteur, « qu’au fond, le français n’est rien d’autre que du latin oral qui a évolué de génération en génération pendant deux mille ans ».
Mais partons du commencement, soit du gaulois, qui n’a, en fait, guère laissé de traces, s’effaçant devant le latin (influencé par le grec), « langue officielle de l’Empire » et, par-là, langue de la promotion sociale. Mais tous ne parlaient pas le même latin, et c’est bien celui (dit « vulgaire ») des paysans et des marchands qui l’emporte au fil du temps. Un latin que le francique des Mérovingiens n’arrive pas à supplanter, tout en influençant néanmoins 13 % des mots étrangers introduits dans le français. La longue marche continue : en 842, avec les Serments de Strasbourg, pointe une langue romane différente du latin écrit, alors que langue d’oc et langue d’oïl accentuent leurs différences. Mais Paris et la bureaucratie veillent. Cette dernière prend l’ascendant : l’ancien français, avec ses 33 sons à base de voyelles et ses déclinaisons, arrive même à conquérir l’Angleterre, avant de laisser place à un français domestiqué par Richelieu et son Académie… Reste de copieux chapitres à découvrir dans ce savoureux ouvrage.