L’état d’urgence bancaire
Confrontées à une mutation de leur activité sur fond de révolution numérique, les banques n’ont qu’une solution : se réinventer.
La sidérurgie du xxie siècle… La formule agace prodigieusement les dirigeants des groupes bancaires. Elle donne pourtant une idée assez précise de la menace qui plane au-dessus de leur tête. Celle d’une douloureuse saignée, comparable à ce que les aciéristes et tant d’autres industriels ont subi ces quatre dernières décennies. En additionnant les réductions d’effectifs déjà annoncées, ce sont plus de 100 000 postes du secteur qui sont appelés à disparaître dans le monde d’ici à 2022, plus particulièrement en Europe. Une hécatombe qui ne fait que commencer, et qui – raison de plus pour s’en inquiéter – ne doit rien à la crise. On a beau chercher, on ne voit pas de métier soumis en même temps à autant de forces potentiellement destructrices : des taux au plus bas qui rognent la rentabilité, une activité corsetée par un mille-feuille réglementaire, des dépenses informatiques qui s’alourdissent, des clients de plus en plus séduits par d’autres offres, qu’il s’agisse des nouveaux services offerts par les fintech ou des moyens de paiement numériques ouvrant un boulevard aux Gafam… Les banques sont attaquées de toutes parts, par des acteurs ultrapuissants et plus innovants qu’elles. Comment échapper au désastre ? Le premier réflexe est de chercher à grossir en ravivant les projets de fusion. De quoi consolider certains bilans, et faire un peu plus que de la figuration sur les marchés internationaux de capitaux. Pas forcément un gage de souplesse et de créativité dans un environnement en pleine mutation. L’autre piste consiste à passer des alliances avec d’autres acteurs – de grands noms de la distribution, par exemple, ou des opérateurs télécoms – dans le but d’élargir sa palette de services. A l’échelle européenne, aucune initiative de ce type n’a encore tenu ses promesses. Devant l’urgence, les groupes bancaires n’ont en fait qu’une solution : se réinventer. En repensant leurs réseaux, le rôle de leurs conseillers, pour monter en gamme et en compétence. Sur ce terrain-là, celui de la « relation client », les « vieux » établissements peuvent espérer se différencier durablement de leurs nouveaux concurrents. Mais sur le plan des usages et des innovations, la bataille paraît malheureusement déjà perdue.
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