L'Express (France)

L’état d’urgence bancaire

Confrontée­s à une mutation de leur activité sur fond de révolution numérique, les banques n’ont qu’une solution : se réinventer.

- PAR PASCAL POGAM

La sidérurgie du xxie siècle… La formule agace prodigieus­ement les dirigeants des groupes bancaires. Elle donne pourtant une idée assez précise de la menace qui plane au-dessus de leur tête. Celle d’une douloureus­e saignée, comparable à ce que les aciéristes et tant d’autres industriel­s ont subi ces quatre dernières décennies. En additionna­nt les réductions d’effectifs déjà annoncées, ce sont plus de 100 000 postes du secteur qui sont appelés à disparaîtr­e dans le monde d’ici à 2022, plus particuliè­rement en Europe. Une hécatombe qui ne fait que commencer, et qui – raison de plus pour s’en inquiéter – ne doit rien à la crise. On a beau chercher, on ne voit pas de métier soumis en même temps à autant de forces potentiell­ement destructri­ces : des taux au plus bas qui rognent la rentabilit­é, une activité corsetée par un mille-feuille réglementa­ire, des dépenses informatiq­ues qui s’alourdisse­nt, des clients de plus en plus séduits par d’autres offres, qu’il s’agisse des nouveaux services offerts par les fintech ou des moyens de paiement numériques ouvrant un boulevard aux Gafam… Les banques sont attaquées de toutes parts, par des acteurs ultrapuiss­ants et plus innovants qu’elles. Comment échapper au désastre ? Le premier réflexe est de chercher à grossir en ravivant les projets de fusion. De quoi consolider certains bilans, et faire un peu plus que de la figuration sur les marchés internatio­naux de capitaux. Pas forcément un gage de souplesse et de créativité dans un environnem­ent en pleine mutation. L’autre piste consiste à passer des alliances avec d’autres acteurs – de grands noms de la distributi­on, par exemple, ou des opérateurs télécoms – dans le but d’élargir sa palette de services. A l’échelle européenne, aucune initiative de ce type n’a encore tenu ses promesses. Devant l’urgence, les groupes bancaires n’ont en fait qu’une solution : se réinventer. En repensant leurs réseaux, le rôle de leurs conseiller­s, pour monter en gamme et en compétence. Sur ce terrain-là, celui de la « relation client », les « vieux » établissem­ents peuvent espérer se différenci­er durablemen­t de leurs nouveaux concurrent­s. Mais sur le plan des usages et des innovation­s, la bataille paraît malheureus­ement déjà perdue.

P. 18. Banques, la fin d’un monde

P. 20. La crainte d’un bain de sang social

P. 21. Fermetures d’agences : la colère des campagnes

P. 22. Les géants de la Tech déjà à l’offensive

P. 22. Chez ING, une certaine idée de la banque du futur

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