De la Gétignère au Bocuse d’or
Mardi 26 septembre, Guillaume Richard participera au concours français du Bocuse d’or. Ce Clissonnais de 31 ans, aujourd’hui chef de cuisine au restaurant Le Floris à Anières, près de Genève, sur les bords du lac Léman, fait partie des 8 sélectionnés à ce célèbre concours de gastronomie. Il aura 5 heures pour séduire le jury. Le vainqueur sera l’unique représentant français de l’étape européenne, prélude au championnat mondial qui se déroulera en 2019 lors du Sirha à Lyon (salon international de la restauration, de l’hôtellerie et de l’alimentation). Retour sur une carrière où tout a commencé à la Gétignère.
Clisson. Il aura son groupe de supporters. Des amis d’enfance et des membres de la famille ( parents, oncles et tantes…) seront à la Maison de la mutualité à Paris, le mardi 26 septembre. Ils s’installeront dans les gradins qui surplomberont l’espace cuisine aménagé pour l’occasion. Ecrans géants, diffusion sur Internet, commentaires de chefs étoilés en direct… pas de doute, l’esprit compétition et la reprise des codes des grandes manifestations sportives voulues par Paul Bocuse, « le pape de la gastronomie » , en 1987, lors de la création de ce concours international, seront des ingrédients bien présents.
Guillaume Richard aussi sera là. Le Clissonnais a été retenu parmi les 120 candidats officiels. Une inscription record. Ce qui rajoute au mérite de ce trentenaire. Lui apportera ses agréments : un peu de stress et beaucoup d’excitation. Ce cordon- bleu aura cinq heures pour travailler le boeuf (épreuve sur plateau) et la langoustine (épreuve sur assiette). « Pour la première épreuve, on disposera d’un filet de boeuf d’environ 3 kg, de 3 joues de boeuf et des os à moelle pour présenter une préparation chaude pour 8 personnes, accompagnée de 3 garnitures. Pour l’épreuve sur assiette, on doit proposer une entrée froide ou chaude pour 8 personnes, composée de langoustines. Avec une nouveauté, il faut l’accompagner d’une combinaison céréale – légumineuse qui sera tirée au sort ( quinoa blanc-lentille verte ; couscous blé dur-pois chiche, sarazinharicot blanc ; épeautre-pois cassé, riz- lentille corail) » , détaille-t-il. Un vrai marathon. Auquel il faut ajouter précision et justesse.
« Je m’épanouis »
Comme un sportif ou un artiste, Guillaume Richard répète ses gammes depuis 3 mois. Avec le commis qui l’accompagnera. Ils font et refont avec les différentes combinaisons possibles. Week-end, jours de congés y passent. Mais aussi la pause entre les deux repas que ce chefcuisinier doit concocter pour les clients du Floris. Autant dire que les journées sont très chargées sur les bords du lac Léman où le garçon a posé son tablier et sa toque il y a maintenant 2 ans et demi. La célèbre table suisse détenue par Claude Legras, depuis 35 ans, cherchait un responsable pour diriger 7 marmitons.
Une opportunité qu’a saisie celui qui était mobile. Et même si son chef étoilé a rendu ses deux distinctions au guide Michelin pour des raisons de charges et de pression, créant le buzz en 2016, la cuisine est toujours raffinée près de Genève. « J’ai carte blanche. Je m’épanouis pleinement ici. Je touche à tout » , s’enthousiasme Guillaume Richard.
Si le maître des fourneaux a un petit faible pour les poissons du lac (brochet, l’omble chevalier et la fera qu’il prépare poêlée, accompagnée de courgettes violon et graines de sarrasin, sauce vierge aux pêches et verveine), Guillaume Richard est un « touche à tout » . « La saison de chasse arrive et ici il y a de vrais mateurs de gibiers (chevreuils, lièvres, perdreaux, bécasses…). La palette est donc large » , sourit-il. Même complète quand on sait que le garçon a une mention en pâtisserie.
Des étoilés, des grands hôtels…
C’était lors de son passage au Manoir de la Boulaie (HauteGoulaine). Avec Laurent Saudeau, deux étoiles au Michelin. Sa deuxième table. Car tout a commencé à la Gétignière à Gétigné. « C’est dans ce restaurant (ndlr. il a fermé depuis) que j’ai réalisé mon apprentissage et passé mon BEP et brevet professionnel, se souvient-il. En 3e, au collège ImmaculéeConception, je ne savais pas trop vers où aller. J’ai commencé un début de seconde à Charles-Péguy. Puis un jour, j’ai eu un déclic. Sans trop expliquer comment. Je voulais devenir cuisinier. Est-ce le fait que mon grand-père soit boulanger, que ma grand-mère et ma mère aiment cuisiner ? Je ne sais pas. Sans doute un tout. Je me suis réorienté » . Et les restaurants se sont succédé. De plus en plus prestigieux.
Après ses études, il obtient son premier poste au Passé simple à Cholet, qui obtient sa première étoile Michelin lors de son passage. Il rejoint ensuite, comme second de cuisine, le Kilimandjaro à Courchevel, la Grand Hôtel à Saint-Jean-de-Luz, puis la réserve de Beaulieu entre Nice et Monaco et Villa ma vie à Cassis, deux établissements avec deux étoiles Michelin. Guillaume Richard aime les défis. Son aptitude lui permet de réussir. Les gènes du sportif qu’est son papa aussi (il a été entraîneur de foot et dirige une salle de remise en forme).
Mais pour celui qui rêve un jour d’avoir son propre restaurant, la remise en question est quasi quotidienne. Même quand il revient chez les parents. Pour mijoter son talent. Avec une sauce plaisir et une tranche de régal. Il se fait aussi jury. Mais pour les saint-jacques, spécialités de la maman, il n’y a pas grandchose à dire. C’est à son tour de mettre les pieds sous la table.