États de sièges
Sur la tapisserie où Louis XIV reçoit le cardinal Chigi à Fontainebleau en 1664, le Roi-soleil trône sur un superbe fauteuil, le légat du pape lui fait face sur une chaise moins richement décorée tandis que les nombreux spectateurs restent debout derrière la balustre. Il est vrai que l’envoyé pontifical est venu faire amende honorable à la suite d’un grave incident diplomatique : un garde du Vatican a tué un page de l’ambassadeur français à Rome. Par cette disposition, Louis XIV manifeste à la fois sa primauté sur Flavio Chigi et leur commune supériorité sur les autres présents.
Savoir-faire français
De même, les banquettes prévues pour Marly en 1712 témoignent que les privilégiés admis dans la résidence favorite du roi devaient malgré tout attendre parfois longtemps l’occasion de le croiser. Le souverain n’était pas seul en représentation : l’exposition montre ainsi un superbe fauteuil cabriolet commandé en 1782 par le comte de Provence (futur Louis XVIII) pour sa loge au théâtre. Le mobilier avait également une fonction politique. Travaillés par les meilleurs ébénistes, habillés de tapisseries inspirées par des artistes connus, illustrés de scènes célèbres, rehaussés d’or, fauteuils, chaises, tabourets, canapés, bergères meublaient les palais dans le royaume et à l’étranger, en particulier les ambassades – une tradition perpétuée par la république comme en témoignent des oeuvres récentes à la fin de l’exposition. L’exportation d’un savoir-faire propre à la France participait de sa grandeur culturelle et économique. Habilement mise en scène par l’ensemblier et décorateur Jacques Garcia, qui propose en contrepoint une salle en jeux de miroirs, l’exposition, à la fois technique et esthétique, met aussi en perspective les différents métiers d’art. n
Huguette Meunier