Quand le théâtre ramène la vie
La scène d’ouverture de cette série rappellera de mauvais souvenirs à ceux qui se sont intéressés au meurtre de Clément Méric. Elle commence exactement de la même manière: à Paris, l’affrontement entre deux bandes de jeunes, militants d’extrême droite d’une part, d’extrême gauche (ici des jeunes de banlieue) de l’autre, laisse l’un d’eux mortellement blessé. Sauf que dans la fiction, c’est un jeune identitaire qui reste sur le carreau. Problème, Stéphane est en fait Bruno, un jeune policier infiltré issu de l’Assistance, élevé dans une famille d’origine algérienne. La famille est éplorée. Surtout sa cousine d’adoption, et amoureuse, Leïla (Luiza Benaïssa). La jeune femme est inconsolable, jusqu’à ce que la découverte du théâtre de Bertolt Brecht lui permette de transformer son deuil.
Pour sa deuxième réalisation (« Qu’Allah bénisse la France », en 2014), le rappeur Abd Al Malik n’a pas eu à chercher bien loin : c’est son épouse, la chanteuse Wallen, qui en a eu l’idée et a scénarisé « 9.3 BB ». Par ses mots, elle a voulu « sublimer l’endroit où (elle a) grandi, sa jeunesse et ses habitants ». Par ses images, lui a choisi de « magnifier la cité HLM ». Tourné entre Paris et le 93 (on reconnaît le Pavillon de Romainville), le résultat est métissé, de cultures du monde, de musiques électroniques, de codes des quartiers populaires et de la jeunesse. La série repose aussi sur une génération d’acteurs éclatants (Victor Bonnel en facho cherchant la rédemption, Horya Benabet en copine intrigante…) à qui donne la réplique un Patrick Bouchitey vieillissant mais impérial en directeur de théâtre passeur de mémoire.
9.3 BB SÉRIE / FRANCE.TV