L'HUMANITE

Les revendicat­ions salariales embrasent Auchan

L’intersyndi­cale CGT, CFTC, FO et CFDT appelle les salariés des magasins et de la logistique à réitérer, vendredi 29 mars, les débrayages massifs de la semaine précédente.

- STÉPHANE GUÉRARD

C’est un mouvement social inédit auquel fait face la direction d’auchan. Pour la première fois depuis la création du groupe à Roubaix, en 1961, une intersyndi­cale constituée de la CGT, la CFDT, FO et la CFTC est parvenue à mobiliser très largement les salariés d’une centaine de super et hypermarch­és, vendredi 22 mars. « Cinquante collègues ont débrayé le matin et 30 l’après-midi, se réjouit Benoit Soibinet, délégué syndical Auchan Zone de vie Brétigny. On avait prévu de rester devant le magasin. Mais les collègues ont eu envie d’y rentrer. On a été très bien accueillis par les clients. Ils nous disaient bravo, qu’on avait raison. » Dans un autre hyper d’essonne, à Montgeron-vigneux, Mathieu, élu CGT, n’avait jamais vu pareille grève : « Quatre-vingts collègues grévistes le matin, 50 l’après-midi. Lors des précédente­s actions, on n’était souvent qu’une dizaine. Il faut dire que la direction avait bien énervé les collègues. »

Se fondant sur un résultat en berne pour 2023 (une perte de 379 millions d’euros), la hiérarchie du cinquième groupe de grande distributi­on français n’a proposé aux élus du conseil social et économique central qu’un petit 1,5% d’augmentati­on salariale collective, assorti d’une remise achats consentie à chaque salarié effectuant ses courses dans son magasin, reconduite à 15 %, donc pas améliorée. Avec une participat­ion de 0,08%, le maigre panier des négociatio­ns annuelles était à prendre ou à laisser.

DES SYNDICATS UNANIMES

Pour la première fois, les syndicats unanimes ont décidé de passer leur tour. Le compte n’y était pas: FO revendiqua­it, par exemple, 5%, la CFTC 4,8%, la CGT 8%. Tous attendaien­t au moins que les salaires se hissent au niveau de l’inflation (4,9 % en 2023). Piquée au vif, la direction a sévi: l’augmentati­on générale a fondu de manière unilatéral­e en un 1,3 %. Idem pour la remise achats : 10 %. Les supermarch­és se sont donc embrasés.

D’autant que le contexte social est morose. «Les plans de réorganisa­tion du travail font que les salariés, qui occupaient auparavant un poste, se retrouvent sur plusieurs métiers différents. En parallèle, on voit les effectifs diminuer », déplore Mathieu. La direction souhaitera­it aussi remanier le temps de travail pour faire des économies et répondre à ses difficulté­s de recrutemen­t. Elle envisage de passer du volontaria­t pour les ouvertures de magasin les dimanches et jours fériés à une semaine de six jours, imposant 15 dimanches et 4 jours fériés travaillés, avec une compensati­on à la baisse de +150 % de salaire à +110 %.

« On nous dit qu’il n’y a pas d’argent, que les salariés doivent faire des efforts. Mais les -300 millions sont la conséquenc­e de choix stratégiqu­es. Ils ont voulu déployer 300 magasins “piétons”, avec une image-prix qui n’est pas bonne par rapport à Lidl, Intermarch­é ou Leclerc. Et on nous fait payer le rachat des 98 magasins Casino », fait valoir Gérald Villeroy, délégué CGT central. Ce dernier rappelle que « les actionnair­es s’étaient partagé un milliard d’euros de dividendes en 2022-2023. Un milliard pour 800 personnes ! ». L’intersyndi­cale appelle à une nouvelle journée de débrayage, vendredi 29 mars. À ce jeu de bras de fer, la direction a déjà lâché, en revenant aux 15 % de remise achats.

 ?? ?? La mobilisati­on a été bien accueillie par les clients de certains supermarch­és. À Cambrai, le 22 mars.
La mobilisati­on a été bien accueillie par les clients de certains supermarch­és. À Cambrai, le 22 mars.

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