L'HUMANITE

Le logement intermédia­ire n’est pas la solution

L’union sociale pour l’habitat, qui fédère les HLM, appelle le gouverneme­nt à rompre avec une approche idéologiqu­e du secteur qui ne répond pas aux besoins des Français.

- C. B.

Cen’estpasavec­desincanta­tions sorties d’un bréviaire thatchérie­n qu’on va régler la difficulté croissante des Français à se loger. « Une idéologie, ça ne construit pas un logement», a souligné le 27 mars Emmanuelle Cosse, présidente de l’union sociale pour l’habitat (USH), qui fédère les organismes HLM. Alors que le gouverneme­nt promet une nouvelle loi logement pour juin, elle a rappelé que le mouvement HLM « n’était absolument pas demandeur d’un texte qui n’arrive que pour porter la réforme de la loi SRU». Toucher, comme l’a promis le premier ministre fin janvier, à cette législatio­n qui oblige les communes à se doter de 25 % de HLM « est d’une gravité extrême », a-t-elle rappelé.

Pour détricoter cette loi, dont l’objectif est de stimuler la constructi­on de HLM et favoriser la mixité sociale, le gouverneme­nt a proposé d’intégrer une part de logements locatifs intermédia­ires (LLI) dans le quota de HLM obligatoir­es. Officielle­ment, il s’agit de s’intéresser au logement des classes moyennes. Mais de quelles classes moyennes s’agit-il quand le plafond d’un LLI s’élève, en Îlede-france notamment, à 3 400 euros mensuels pour une personne seule ? «Favoriser ce type de logement dans un pays où un cinquième des salariés sont au Smic, et où le salaire médian est de 1 800 euros, c’est une façon de dire à tous ceux qui gagnent moins de 2 000 euros par mois : vous n’êtes pas notre priorité », observe Emmanuelle Cosse.

Les bénéfices politiques de cette attaque sont à chercher du côté d’une certaine droite et du RN. Au fil des ans, le texte a fini par faire l’objet d’un relatif consensus, comme l’a montré l’adoption sans difficulté de sa pérennisat­ion par les deux assemblées, en 2022. De nombreux élus, y compris à droite et dans la majorité, ont d’ailleurs mis en garde le gouverneme­nt depuis les annonces de Gabriel Attal. Les seuls gagnants sont « les intérêts de quelques maires opposés à la loi SRU parce que contre le principe même de la mixité sociale », fustige la présidente de L’USH.

En promettant 30 000 nouveaux LLI en trois ans, le gouverneme­nt fait, en outre, une erreur d’échelle. «Ce n’est pas cela qui va relancer la machine », a ironisé Marianne Louis, directrice générale de L’USH. Ce « choc de l’offre », tel qu’il est présenté, représente la constructi­on de 10 000 LLI par an, répartis sur 22 territoire­s. Très loin de compenser la baisse globale de la constructi­on entamée depuis l’arrivée d’emmanuel Macron au pouvoir, soit un déficit de 200 000 logements par an. Pas assez non plus pour générer un effet d’entraîneme­nt sur tout le secteur que le HLM, lui, s’il était moins ponctionné, serait en mesure de produire.

Même au niveau budgétaire, le mantra du désengagem­ent financier est à courte vue. En 2022, le logement a coûté 42 milliards d’euros de subvention­s à l’état mais lui en a rapporté 97 milliards en termes de rentrées fiscales. Rappelant ce rôle essentiel, Emmanuelle Cosse a mis en garde. : « Si on arrête tout, il n’y aura plus de recettes de TVA. »

 ?? MOURAD ALLILI/SIPA ?? Le pays compte un déficit de 200 000 nouveaux logements par an.
MOURAD ALLILI/SIPA Le pays compte un déficit de 200 000 nouveaux logements par an.

Newspapers in French

Newspapers from France