OTAGE DE LA NSA, OU LA NSA COMME OTAGE
Invité récemment par Nicolas Poincaré, sur Europe 1 à participer à un débat sur les récentes révélations autour des écoutes de la NSA, j’indiquais en guise de préambule : « Quelle information ! Quel scoop ! Les espions font de l’es
pionnage… » Mon confrère Jean-Marc Manach me faisait remarquer que nous n’étions plus au stade de l’espionnage mais à celui de la surveillance généralisée. Je n’en suis pas certain. Pour plusieurs raisons. D’une part, je commence à être passablement étonné par le nombre croissant de documents émis par Edward Snowden, et par lui seul. Certes, ce lanceur d’alertes a assurément fourni des informations qui éclairent d’un jour nouveau les pratiques de l’agence américaine la plus secrète mais tout semble maintenant disproportionné eu égard au statut de M. Snowden. Si tel est le cas, la NSA a des grandes oreilles mais le système de protection de leurs données est une véritable passoire. Par ailleurs, on nous étourdit avec quelques noms de code d’opérations menées par l’agence. En recherchant sur différents sites, j’ai trouvé plus d’une centaine de programmes, dont certains avec des noms très exotiques, l’espionnage n’empêchant pas une certaine poésie.
DES ALGORITHMES POUR DISSÉQUER LES SMILEYS ?
Par ailleurs, quelle que soit la puissance de calcul et de stockage dont dispose la NSA, il est fort difficile de voir l’intérêt de l’agence à écouter des millions de milliards de conversations sur les réseaux sociaux. L’agence dispose-telle d’algorithmes suffisamment puissants pour disséquer les smileys et comprendre leur véritable signification dans le contexte de la conversation ?Enfin, comme le rappelait mon excellente consoeur Nicole Bacharan, au cours de la même émission, les terroristes du 11-Septembre prenaient grand soin de masquer leurs desseins réels dans les conversations téléphoniques et électroniques. Et, plus récemment, prodigieusement agacés par les révélations – et non les preuves comme certains l’affirment – de M. Snowden, les Autorités brésiliennes ont décidé de truffer leurs messages de données dites sensibles, « bombe, attentat, et autres avanies », afin de rendre fous les ordinateurs de la NSA. Plus sérieusement, la présidente du Brésil, Mme Rousseff, a décidé d’annuler un voyage aux États-Unis en guise de protestation plus énergique. Pendant ce temps, les Européens font des effets de manche. On comprend parfaitement l’idée sous-jacente. Il s’agit de mettre les États-Unis en mauvaise posture afin d’être plus percutants dans les discussions à venir sur les nouvelles dispositions commerciales. C’est de bonne guerre et de bonne politique. Toutefois, ce feuilleton à épisodes tend à devenir lassant.