devenir l’OS du centre de données
La lutte fait rage pour le contrôle des centres de données de demain. À côté de VMware et Microsoft, Open Stack veut jouer sa carte et sa différence, comme l’indique Mirantis, principal intégrateur de la solution.
Open Stack vient de fêter son 5e anniversaire mais la solution a déjà toutes ses dents et connaît un développement rapide sur le marché, bien soutenue par de plus en plus d’acteurs de l’industrie informatique. Sa croissance estimée est de près de 40 % par an et ce jusqu’en 2018. L’investissement récent d’Intel de près de 100 millions de dollars dans Mirantis, principal intégrateur Open Stack, donne encore plus de consistance au brillant futur de la pile logicielle.
L’OS de demain ?
Aujourd’hui, Open Stack en est au stade où était Hadoop il y a quelques années, lorsque Intel investissait dans Cloudera ! Il y a donc beaucoup d’expérimentation et de proof of concept mais peu de réelles mises en oeuvre. Cette étape n’est que provisoire et de nombreuses entreprises se jettent désormais à l’eau avec l’idée d’accélérer leur transformation et de positionner plus de charges de travail dans le Cloud. Il reste cependant beaucoup à faire comme l’indique Boris Renski, co-fondateur de Mirantis et directeur marketing. La volonté est de devenir l’OS du centre de données. Pour cela, Open Stack, et indirectement Mirantis, ne comptent pas le faire tout seul. « Il y a de nouvelles solutions très sympas qui sont apparues, comme Mesos, Docker ou Kubernetes. Ces solutions sont en fait complémentaires et peuvent ensemble régler les problèmes actuels rencontrés dans les centres de données. Notre vision est d’éviter le syndrome NIH (Not Invented Here) et de ne pas réinventer la roue. Pour nous, l’avenir est d’intégrer ces différentes solutions entre elles pour apporter la meilleure solution partout. » L’idée est clairement de prendre les différentes solutions là où elles sont les meilleures et de proposer un ensemble regroupant ces fonctions. Ainsi Docker règle parfaitement le problème de portabilité des charges de travail sur l’ensemble des environnements et Mesos est cependant plus pertinent sur le scheduling de
ces tâches dans les environnements clustérisés, tandis que Kubernetes est supérieur dans la gestion et le monitoring. Cette approche semblait largement partagée par tous les acteurs de l’industrie et les sponsors de l’événement qui s’est tenu à Mountain View à la fin du mois d’août, l’Open Stack Silicon Valley. La plupart des grands acteurs de l’industrie étaient présents comme Microsoft, VMware, Cisco, IBM, HP… nous avons d’ailleurs rencontré nos interlocuteurs d’Alterway lors de la dernière WPC de Microsoft qui eux aussi attendaient beaucoup de cette réunion pour connaître les pistes d’évolution d’Open Stack dans les mois à venir et l’intégration d’Open Stack avec les technologies de containers. C’est chose faite !
Un début de reconnaissance
Jonathan Bryce, le directeur exécutif de l’Open Stack Fondation, s’est montré encourageant sur le chemin parcouru depuis trois ans. Après une période durant laquelle la solution s’est concentrée sur l’évolutivité horizontale et la définition des critères précis pour développer une stratégie de Cloud, il pointe maintenant qu’il est nécessaire d’aller sur ces environnements pour de bonnes raisons. Il évoque ainsi les exemples dans l’industrie automobile qui s’appuie sur Open Stack pour ses programmes de Big Data. Open Stack devient ainsi une plate-forme d’innovations dans ces entreprises avec souvent d’importantes économies à la clé. Amit Tank, utilisateur travaillant chez Cognizant, voit en Open Stack une plateforme d’intégration et dans la convergence avec la technologie de containers la solution à certains problèmes qui vont favoriser l’adoption et la maturité de la plate-forme. Cela est confirmé par un analyste du Gartner qui note de nombreuses expérimentations et des essais de production sur les environnements de développement d’applications. Craig McLuckie, chez Google, acquiesce et affirme que Open Stack a démocratisé l’IaaS. La montée vers le PaaS va apporter de nombreuses opportunités d’accélérer la maturité de l’ensemble comparativement à la première génération de la plate-forme. Il note cependant que l’ouverture originelle doit être conservée.
Encore du travail à faire
Si ce premier constat est enthousiasmant, il ne faut pas cacher le revers de la médaille de la plate-forme. De nombreux intervenants ont fustigé la difficulté de mise en oeuvre et ont demandé de simplifier les opérations de déploiement et de gestion. Une table ronde lors de l’événement confirmait que Open Stack était le logiciel le plus complexe jamais installé dans l’histoire de l’informatique. Randi Bias, VP Technology d’EMC et membre du conseil d’administration de l’Open Stack Foundation, insiste, lui, sur d’autres aspects, tout en reconnaissant les difficultés énoncées. Il met en avant le coût souvent minoré du « faites-le vous-même » propre aux solutions open source. « Le coût de ce travail est très élevé et encore plus élevé que vous
ne le pensez ! » , clame t-il. Il prône la mise en place d’une véritable architecture de référence sur une base vérifiable par des tests et des programmes pour identifier les maillons qui font la valeur de la solution. James Staten, stratégiste en chef sur le Cloud pour Microsoft indique d’ailleurs que les services informatiques et les entreprises ne sont pas prêts pour le Cloud en général et pour Open Stack en particulier, mettant en exergue les changements de fonction et d’organisation induit entre le modèle habituel de gestion des centres de données et celui du Cloud privé. Ces demandes de simplification étaient partagées par l’ensemble des intervenants y voyant un frein certain dans un déploiement plus étendu de la plate-forme. Il en est de même pour les compétences avec des demandes réitérées de formation d’informaticiens sur les différentes technologies d’Open Stack ou de ses produits « frères ». Et tous les industriels présents de défiler
Le coût de ce travail est très élevé et encore plus élevé que vous ne le pensez !
Randi Bias, VP Technology d’EMC.
sur scène pour essayer de démontrer que leurs solutions Open Stack mettaient en oeuvre ces désirs de simplification. L’intervention la plus intéressante aura été celle de Mark Shuttleworth, le PDG et fondateur de Canonical, le distributeur d’Ubuntu, qui lance BootStack, laquelle vise à rendre « invisible » Open Stack. BootStack automatise totalement les différentes opérations sur la plate-forme de déploiement via la remise à niveau des machines hôtes dans le Cloud en s’appuyant sur des serveurs classiques à faible coût (x86). L’intérêt de la solution est justement d’éviter les dépenses qu’engendrent les consultants et les spécialistes sur la plate-forme en conservant une base standard Linux et ses containers LXC, ou leur prochaine génération les LXD, un hyperviseur de containers permettant de lancer des centaines de ces containers sous une machine virtuelle.
Réaction ou développement avec la technologie des containers ?
À la fin de la fin, il convient cependant de s’interroger si Open Stack va de manière naturelle vers les containers ou si l’industrie essaie de raccrocher son pari précédent à la nouvelle coqueluche technologique du moment. Tout comme VMware qui, dans son projet Photon ( lire notre article dans ce magazine), vise à encapsuler les containers dans une machine virtuelle, Open Stack fait le choix d’une approche assez étonnante. Pour les containers, il n’y a pas forcément besoin d’une machine virtuelle et ils peuvent fonctionner sur une machine « nue ». Alors, comment expliquer la volonté à tout prix de les placer dans un environnement virtualisé ? La réponse devient évidente. Fortement virtualisées et dominant parfaitement ces environnements, les entreprises sont plus enclines à accepter des nouvelles technologies sur des secteurs qu’elles dominent technologiquement avec donc une courbe d’apprentissage plus courte. Il s’agit aussi de savoir quels types de containers seront les plus optimisés sur la plate-forme. Si Docker est sur toutes les lèvres, d’autres sont désormais bien présents comme CoreOS avec Tectonic ou Rkt – prononcez roc
ket –, Canonical… Et beaucoup sont encore en incubation. Comme quoi Open Stack n’est pas encore tout à fait prêt pour devenir simple ! ✖