CAS DE CONSCIENCE
En 139 numéros de L’Informaticien, c’est la première fois que – en tant que directeur de la publication – j’aurais pu succomber à la tentation de « bidonner » un test, ou plus précisément de m’arranger avec les résultats afin qu’ils soient plus conformes à notre carnet de commandes publicitaires. En effet, j’imaginais déjà la réaction de certains lecteurs et annonceurs mettant en doute notre crédibilité signifiant que le produit Lenovo est la machine la plus performante uniquement parce que le constructeur chinois est également présent au travers d’une publi-information. Nous aurions pu rétorquer après coup, mais le mal aurait été fait. Aussi, je préfère prendre les devants. Les résultats sont ce qu’ils sont. Les tests de performance ont été réalisés par la rédaction et je n’y ai pas participé. Les lecteurs découvriront que HP est également présent dans des pages de publicité mais la machine que nous avons testée est l’une des moins rapides – à la notable exception du test Excel qui a été fait et refait à de multiples reprises tant le résultat nous surprenait. Fallait-il relever sa note et abaisser celle de Dell qui ne communique pas dans ce numéro ? Et que dire du Macbook ou d’Acer ? À l’exception d’un cahier spécial, réalisé voici plus de dix ans, Apple n’a jamais passé une page de publicité dans notre magazine. Précisons également que nous n’avons jamais été invités à un quelconque événement hors de Paris par le constructeur californien, ni reçu téléphone ou tablette en « prêt longue durée »… selon la terminologie employée par les communicants de la Pomme. Bref, nous n’avons jamais « bidonné » l’information en fonction de la publicité. Le directeur marketing d’un grand constructeur de microprocesseurs qui m’avait passé une soufflante par mail et téléphone parce que l’un de ses produits figurait parmi les flops de l’année, alors qu’il communiquait dans nos pages – pour un autre produit, performant, celui-là – pourrait en témoigner.
INFORMATION OU CONTENU ?
À une époque où la presse éprouve de plus en plus de difficultés, la tentation devient grande de traiter l’information selon la publicité ou la couleur politique. Certains patrons de presse ne s’en privent pas, en témoignent certains événements récents. Ajoutons que le journalisme est aujourd’hui plus cher à réaliser tellement l’information est verrouillée, alors que les lecteurs sont moins enclins à l’acheter. Comme le souligne l’excellente tribune de Bertrand Duperin, parue chez nos confères de FrenchWeb le 23 septembre dernier, on ne parle plus d’information mais de contenu : « Médias et journalisme ne vont plus de pair et c’est grave. » Finalement, et pour être complètement transparent, une autre question s’est posée : qu’aurais-je fait si les résultats avaient été inverses, à savoir que les machines des annonceurs présents avaient été reléguées dans les profondeurs du classement ? Aurions-nous procédé à quelques arrangements avec la réalité ? Ce n’est toujours pas pour cette fois !