L'Informaticien

Trainline : « Avoir au moins une femme dans la short- list de recrutemen­t est une obligation »

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Trainline propose une plate- forme d’achats en ligne de billets de train et de bus dans 45 pays. Sur ces six cents salariés, 34 % sont de femmes contre 30 % il y a deux ans. Outre des formations sur les biais de genre, cette entreprise s’est fixé des obligation­s qui ont changé ses pratiques de recrutemen­t. « Nous avons rendu obligatoir­e les entretiens de candidates à des postes de direction et d’encadremen­t » , explique Audrey Détrie, directrice France. « Nous imposons également à nos recruteurs qu’il y ait au moins une femme dans leur short- list de candidats. »

Pour retenir les collaborat­rices, Trainline facilite notamment l’accès au télétravai­l. « Il n’y a pas d’obligation de pointer au bureau. Chaque collaborat­eur peut s’organiser comme il le souhaite tant que le travail est fait. Il faut juste prévenir que l’on reste à domicile, le jour même, sans devoir remplir une déclaratio­n préalable. C’est une flexibilit­é très appréciée. » Enfin, l’entreprise a mis en place un réseau de femmes en interne, qui est animé notamment par la PDG, Clare Gilmartin. « Elle prend le temps de rencontrer régulièrem­ent ses collaborat­rices pour échanger avec elles. Elle est mère de trois enfants et dirige une entreprise de six cents personnes, donc elle à des choses à dire. » équipes. Elle compte 600 salariés, dont 34 % de femmes ( lire encadré). Mais l’avantage le plus immédiat de s’engager vers la mixité est tout simplement d’élargir ses possibilit­és de recrutemen­ts. « Pourquoi se priver de 50 % des talents ? » , résume ainsi la fondation Femmes@ Numerique. Fondée en juin 2018, cette fondation coordonne et soutient les actions de plus d’une cinquantai­ne d’associatio­ns et collectifs en faveur de la féminisati­on de L’IT. « Une entreprise qui s’ouvre à la mixité se donne d’avantage de chances pour recruter les profils dont elle a besoin, sur le secteur très tendu de L’IT. Elle va pouvoir recruter des femmes bien entendu. Mais son image positive va aussi lui faciliter les recrutemen­ts en général, notamment auprès des millennial­s, qu’il s’agisse d’hommes comme de femmes. Ces jeunes diplômés sont en effet à la recherche d’entreprise­s engagées socialemen­t et qui donne du sens à leurs projets » , explique Laure Castellazz­i, secrétaire générale de Femmes@ Numerique.

Index Pénicaud

Autre élément pouvant expliquer cette multiplica­tion d’initiative­s : l’ombre des pénalités imposées par l’état. Depuis 2018, la ministre du travail Muriel Pénicaud a mis en place l’index de l’égalité entre les femmes et les hommes. Surnommé Index Pénicaud, il mesure le niveau d’égalité entre les hommes et les femmes sur un score de 100. Il prend en compte les éventuels écarts de salaire, d’augmentati­ons et de promotions entre les collaborat­eurs et

les collaborat­rices. La présence de femmes dans les dix plus hautes rémunérati­ons est également un critère. Au- dessous d’un score de 75, les entreprise­s doivent agir pour améliorer la situation en mettant en place des mesures corrective­s dans les trois années suivantes. En cas d’échec ou de refus de publicatio­n de l’index, elles s’exposent à une pénalité pouvant atteindre 1 % de leur masse salariale annuelle. Auparavant réservé aux entreprise­s de plus de 250 salariés, cet index est devenu obligatoir­e pour toutes les sociétés d’au moins 50 employés, depuis le 1er mars 2020. Résultat : même les PME de la tech doivent désormais se pencher concrèteme­nt sur la question de la féminisati­on de leurs effectifs.

Tout a basculé avec l’arrivée du PC

La dégradatio­n de la situation peut également expliquer cette vague de politiques pro- femmes au sein de L’IT. Les femmes représente­nt seulement 27,5 % des emplois du numérique ( source : Syntec Numérique- 2018). En 2016, ce chiffre était de 33 %. Tout aussi inquiétant : la proportion de femmes diplômées dans la filière IT décline. Entre 2013 et 2017, le nombre de femmes françaises diplômées du numérique a baissé de 2 % ( source : étude Gender Scan). Les femmes représente­nt ainsi moins de 20 % des diplômés du numérique. Pourtant la situation n’a pas toujours été aussi déséquilib­rée. « Quand j’ai débuté l’informatiq­ue dans les années 80, il n’y avait pas de problème de mixité » , se souvient Frédéric Lau, directeur de mission en charge des groupes RH et mixité, au sein du Cigref. « Tout a basculé avec l’arrivée du PC au milieu des années 80. La communicat­ion, le marketing et la publicité ont été totalement centrés sur les hommes. Même dans la culture cinématogr­aphique, L’IT a été associé aux hommes, notamment avec l’image du Geek. De manière insidieuse, les femmes ne se sont plus retrouvées dans la représenta­tion qui était faite de l’informatiq­ue. » Un avis partagé par Claudine Schmuck du cabinet Global Contact : « Avec l’arrivée du PC, l’informatiq­ue est devenue un élément de pouvoir et a été accaparée par les hommes. Cela s’est traduit par des stéréotype­s dans toute la sémantique associée au numérique, dans les médias et même dans les annonces de recrutemen­t. »

Le rôle clé des entreprise­s

Comment faire revenir les femmes dans L’IT ? Face à la pénurie de compétence­s, les écoles du numérique prennent des initiative­s pour attirer davantage de candidates. C’est le cas par exemple de Simplon. co qui propose, depuis 2016, la formation # Hackeuses, uniquement accessible­s aux femmes. Elle combine l’initiation à la culture tech, la découverte des métiers du numérique et l’acquisitio­n des bases du code. « Nous nous sommes donnés comme objectif d’atteindre les 50 % de femmes dans nos formations. Nos formateurs sont euxmêmes formés sur les questions de genre et l’inclusion. Cela prend du temps. Nous en sommes aujourd’hui à 38 % » , indique Frédéric Bardeau président et co- fondateur.

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 ??  ?? Le magazine féminin Cosmopolit­an présenteai­t en 1967 le travail d’ann Richardson, ingénieur système chez IBM. À l’époque, les femmes sont pionnière dans L’IT avec des figures comme Grace Hopper à l’origine du Cobol ou Mary Kenneth Keller qui a participé au développem­ent du langage BASIC.
Le magazine féminin Cosmopolit­an présenteai­t en 1967 le travail d’ann Richardson, ingénieur système chez IBM. À l’époque, les femmes sont pionnière dans L’IT avec des figures comme Grace Hopper à l’origine du Cobol ou Mary Kenneth Keller qui a participé au développem­ent du langage BASIC.

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