Une nouvelle occasion manquée
Loin de nous l’idée de dénigrer la mer. Après tout, grâce à ses territoires d’outre- mer, la France est l’un des premiers domaines maritimes au monde. Dans ces conditions, qu’un ministère de plein exercice lui soit de nouveau dédié est parfaitement légitime. Cependant, et encore plus dans le contexte sanitaire et économique que nous venons de vivre et qui est appelé à se prolonger durablement, le numérique a largement fait preuve de son utilité et de son efficacité.
Tout le monde est bluffé par la rapidité et la simplicité avec lesquelles les populations se sont adaptées au télétravail ; ceci à un point tel que certaines entreprises ont choisi ce mode de fonctionnement comme étant désormais la norme. Les individus ont également trouvé leur compte dans ce nouveau système avec comme conséquence que le retour au bureau et la reprise des transports n’enchantent guère la majorité. Les grandes entreprises du secteur ont proposé une évolution de leurs offres produits à une vitesse tout aussi hallucinante et le monde boursier ne s’est pas trompé sur cette bascule qui s’opère. Déjà surpuissants, les Gafam et leurs satellites ont vu leurs cours d’abord baisser pour ensuite remonter très fortement. À la fin juin, la capitalisation boursière des cinq Gafam atteignait un montant équivalent au PIB de la France et de l’allemagne réunies ! Certes, il est tentant d’affirmer que la Bourse est déconnectée de l’économie réelle, mais les résultats financiers de ces entreprises ne plaident pas pour cette théorie.
Dans ces conditions, et alors que nos gouvernants ne cessent de nous répéter la nécessité pour la France et l’europe de se doter – enfin – d’une économie numérique digne de ce nom, laquelle permettrait à notre région d’être moins dépendante des deux grands blocs, américain et chinois, la nomination d’un ministre de plein exercice consacré à l’économie numérique et aux Technologies ne semble pas d’une grande incongruité. Des voix se sont d’ailleurs très rapidement élevées contre cet « oubli » . De timides contre- feux ont été allumés, expliquant qu’il existait désormais un ministère de la Relance lié aux affaires économiques, ou encore celui de la Transformation lié à la fonction publique, mais ces explications sont passablement alambiquées.
D’autres tentent une diversion : le numérique est partout donc nul besoin d’un ministère dédié. « C’est un peu court, jeune homme » , disait Cyrano. La justice, la police et d’autres domaines, régaliens ou non, sont partout et bénéficient d’un ministère et d’une Administration. Le numérique, quant à lui, dispose déjà de cette administration au travers de différentes organisations et autres conseils. Ce serait peutêtre une bonne idée de donner une impulsion et un cadre à toutes ces initiatives au travers d’un ministère puissant et transverse. Tout le monde s’accorde également pour signifier que le développement technologique, dans le public comme dans le privé, est l’un des meilleurs leviers pour réaliser des économies de fonctionnement. À l’heure où les déficits et la dette explosent, se préoccuper de réduire les coûts par ce biais sans remettre en cause les acquis de notre Société ne serait pas non plus de mauvaise politique. Il en a été décidé autrement. Nous considérons que ceci est dommage et risque même d’être dommageable. Espérons qu’une correction interviendra rapidement.