Le casse- tête des visas !
Face à la crise du coronavirus, l’administration américaine a pris des mesures drastiques pour limiter la délivrance des visas pour les étrangers. Si les étudiants et enseignants – visas F et J – sont de nouveau autorisés aux États- Unis, pour le reste – visa H- 1B en particulier – rien n’a évolué, et ce, au grand dam des poids lourds de la Tech et des IT qui l’utilisent pour accueillir de nombreux ingénieurs et informaticiens.
Le monde est secoué depuis des mois par la crise de la Covid- 19. Si le virus vient bien entendu toucher directement les populations, cela fait des semaines que les effets se font ressentir au- delà de la santé avec un impact sur les déplacements mondiaux et l’économie mondiale. Car, en prime, le virus a tendu les relations diplomatiques et commerciales entre les différents pays, notamment avec les États- Unis qui ont imposé des restrictions de visas à certains demandeurs.
Immigrés vitaux pour l’industrie technologique
Cela concerne beaucoup de cas comme on peut le voir dans le monde universitaire et dans l’univers de la tech, des IT avec même des restrictions pour des employés d’entreprises technologiques chinoises comme Huawei. Toutes ces décisions ont des conséquences directes sur un très grand nombre d’emplois tant dans les entreprises que sur les campus avec les étudiants et les professeurs. Concrètement, depuis le 24 juin et jusqu’au 31 décembre 2020, le président des États- Unis, Donald Trump, a mis en place la directive Immigration and Customs Enforcement ( ICE) qui réduit la délivrance des visas. L’obtention de nombre d’entre eux est donc limitée et, surtout, ils sont plusieurs à être concernés par les mesures de l’administration Trump. Parmi ceux incriminés, on trouve les visas H- 1B et H- 2B, J, L, F et M ( lire l’encadré).
La non- délivrance du H- 1B pose de vrais problèmes aux grandes entreprises technologiques, comme l’a rappelé Jason Oxman, directeur de l’information Technology Industry Council ( ITIC). « Alors que les entreprises américaines font revenir leurs salariés au travail, les immigrés de l’industrie technologique sont vitaux pour maintenir les espoirs de reprise, ainsi que pour soutenir la réponse des États- Unis au Covid19 » , a- t- il assuré. Ses propos ont eu un écho fort car ce groupe rassemble les plus grosses entreprises technologiques présentes sur le territoire américain ( Google, Facebook, Amazon, Apple, Microsoft, Qualcomm, Twitter…).
Étudiants et enseignants en première ligne
Pour les catégories F et M, qui ciblent les étudiants et les formations professionnelles, c’est 1,2 million de personnes qui est concerné avec une grande majorité d’asiatiques ( Chinois, Indiens, SudCoréens) selon les données officielles du département de la Sécurité intérieure des États- Unis ( United States Department of Homeland Security). En 2019, par exemple, l’immigration américaine a délivré 364 000 visas F- 1 et 9 000 visas M- 1. On notera aussi que les universités américaines, qui misent beaucoup sur les étudiants du monde entier, comptent environ 5,5 % d’étudiants étrangers dans leurs effectifs. Dans les visas F- 1, on trouve différents programmes comme les CPT ( Curricular Practical Training) et OPT ( Optional Practical Training) qui permettent aux étudiants internationaux de travailler sur le territoire américain. Enfin, les VIE ( Volontariat international en entreprise), un système subventionné par l’état français, reçoivent un visa J- 1 et se retrouvent de fait dans la liste.
Seuls les visas E, I, O, P et Q ne sont pas concernés par les mesures de cet « Immigration and Customs Enforcement » . Bien sûr, les citoyens américains et les residents permanents légaux peuvent entrer et sortir – c’est logique – du pays à leur guise, tout comme les ressortissants étrangers mariés à un citoyen américain, ou enfant d’un citoyen américain, les ressortissants d’un pays étranger exerçant une activité professionnelle essentielle pour la chaîne d’approvisionnement alimentaire et les étrangers dont l’entrée est jugée nécessaire dans l’intérêt national du pays.
Universités et entreprises de la Tech contre l’administration Trump
Dans la sphère de la tech américaine et dans le monde universitaire, les annonces ( particulièrement pour les visas J1, F1 et H- 1B) de l’administration Trump ont soulevé de vives réactions. L’université de Harvard et le Massachusetts Institute of Technology ( MIT) ont intenté un procès contre cette directive ICE. Ces deux fameuses universités ont été rejointes par plus d’une douzaine d’entreprises technologiques américaines, dont Google, Facebook et Microsoft.
Les plaignants se sont élevés contre une nouvelle décision annoncée le 6 juillet. À cette date, le gouvernement américain a interdit aux étudiants internationaux de rester aux États- Unis, à moins qu’ils ne suivent au moins un cours en présentiel. En raison de la très forte croissance du nombre de cas de Covid19, beaucoup d’universités ne savent pas encore si elles pourront assurer des cours en présentiel ou si elles devront tout faire en distanciel. Cela concerne également de nombreux autres écoles privées, notamment des écoles françaises ou des alliances comme celle nouée entre la Columbia University de New York et l’école Polytechnique, Sciences Po et l’université Paris 1 Panthéon- Sorbonne.
Pour dénoncer la gestion du gouvernement, ce petit groupe assurait que la directive perturberait leurs plans, rendant impossible le recrutement d’étudiants internationaux qui devaient rejoindre des entreprises qui avaient prévu de les embaucher. Cela perturbe le processus de recrutement sur lequel les sociétés se sont appuyées pour identifier et former leurs futurs employés.
Une contribution substantielle au PIB
Chiffres à l’appui, les sociétés technologiques ont démontré que les étudiants internationaux résidant aux États- Unis apportent une contribution substantielle au PIB du pays. Les étudiants internationaux des universités et collèges américains auraient ainsi contribué pour près de 41 milliards de dollars à l’économie américaine et soutenu 458 290 emplois sur l’année universitaire 2018- 2019. Portée devant les tribunaux, l’affaire a tourné en la faveur des plaignants. La juge fédérale de Boston, Allison Burroughs, a annulé la décision de l’administration Trump. Résultat : étudiants, enseignants et stagiaires ont de nouveau accès au territoire américain. Une décision qui va dans le sens de ce qu’a fait la Louisiane puisque le Bureau des Affaires consulaires américain avait déjà annoncé son intention de reprendre la délivrance des J- 1. Toutes ces nouvelles permettant aux étudiants et enseignants de revenir ont rassuré le monde de la Tech. Mais cela ne concerne pas encore tous les pays. Actuellement, seuls les Européens peuvent obtenir un visa et se rendre aux États- Unis pour enseigner ou suivre un cursus universitaire. Par exemple, la Chine, le Brésil ou l’iran figurent toujours sur la liste des pays interdits de visas. Tout devrait encore évoluer dans les semaines à venir et de nouvelles directives de l’administration américaine pourraient être annoncées. À suivre donc. ✖