Hollande ou comment s’en débarrasser
Depuis dimanche, il y a du 21 avril dans l’air. Quelle est l’autorité d’un président qui n’est plus sûr de figurer au second tour en 2017 ? Surtout quand la panique gagne son camp et qu’il y a à Matignon un homme de la trempe de Manuel Valls…
C’était il y a un an à peine, juste avant l’été, et Hollande regardait les nuages noirs qui, déjà, s’amoncelaient à l’horizon de son quinquennat. 2014 – il le savait mieux que quiconque – allait être, après deux ans d’une tranquillité toute relative, l’année terrible des premiers rendez-vous électoraux. Municipaux, d’abord, européens, ensuite. Dans la gestion de cette séquence à hauts risques, le président avait sa théorie. Celle de « la double lame » . « Dans ce genre d’affaire, confiait-il, une défaite en entraîne toujours une autre. Les électeurs ne corrigentjamaisleurvote. Quandilsontl’occasion de se rendre à deux reprises aux urnes, coupsur coup, ilsont tendanceà frapperencoreplusdurementlaseconde fois que la première. La droite a connu ça au printemps 2004 quand nous l’avonsécraséeauxrégionalespuis, dans la foulée, aux européennes. Sarkozy doit, sansdoute, s’ensouvenir… »
Dans une veine comparable, Hollande expliquait pourtant que, pour un président, il y avait bien pis que des défaites électorales lors de ces élections que l’on dit intermédiaires. « Ledanger absolu » , selon lui, c’était « la rupture avec l’opinion » . Celle qui agit comme un court-circuit. « Alors, expliquait-il d’un ton grave, quoi qu’on dise, quoi qu’on propose, quoi qu’on imagine, la messe est dite. C’est irrattrapable. Mitterrand n’est pas passé loin de cette situation en 1984. Chirac l’a connue après son échec lors du référendumde 2005 sur le traité constitutionnel européen. Moi, jegardetoujourscelaentête. Jeveuxbientout: lesreculs, lescompromis etmême, s’il le faut, les tournants. Mais, larupture, çajamais! »
Aujourd’hui, pourtant, elle est là. Tout ce que Hollande avait prévu a fini voulait encore croire que le bilan des maires socialistes allait leur permettre de sauver la mise. Dans la dernière ligne droite de la campagne des européennes, il imaginait qu’avec quelques mesures ciblées sur les impôts des plus pauvres un gouvernement plus professionnel et moins gris que celui d’Ayrault allait pouvoir offrir aux listes socialistes ce petit plus qui permettrait d’ « enjamber » le scrutin. Rien de tout cela n’a fonctionné. Retour donc à l’hypothèse catastrophe. La rupture. Franche et profonde. Définitive? Déjà visible dans les sondages. Désormais, menaçante dans les urnes. A tel point qu’il faudra bien, un jour, essayer de comprendre pourquoi, sous la Ve République, c’est souvent l’Europe – en 1984 pour Mitterrand, en 2005 sous Chirac, selon les propres critères de Hollande – qui a servi de catalyseur, comme dit Valls, à cette « colère » du peuple qui laisse pantois les présidents en place.
A chaud, dimanche soir, à l’heure des premières analyses et des premiers commentaires avec ses collaborateurs élyséens, Hollande s’est bien gardé d’aborder de front une question aussi désagréable tant elle bouscule ses habitudes, ses repères et surtout son propre pouvoir. C’est Valls qui, vers 21 heures, a fait le travail. Il était monté au front durant la campagne avec la conviction, comme toujours, que, s’il ne le faisait pas, on le lui en ferait le reproche. Il n’a pas esquivé l’obstacle, au soir de la défaite, lors d’une intervention télévisée d’une tonalité – dans la forme comme sur le fond – éminemment présidentielle. Tout cela met en image un rapport de force inusité au sommet de l’Etat. Fin mars, Hollande, contraint et forcé, avait décidé de tout changer. A commencer par le Premier ministre. Au