L'Obs

Danse avec Israël

COMPAGNIE DE DANSE BATSHEVA : NAHARIN’S VIRUS, JUSQU’AU 21 DÉCEMBRE, ET DECADANCE PARIS, DU 24 AU 28, THÉÂTRE DE CHAILLOT, RENS. : 01-53-65-30-00. COMPAGNIE HOFESH SHECHTER : POLITICAL MOTHER, JUSQU’AU 20 DÉCEMBRE, GRANDE HALLE DE LA VILLETTE, RENS. : 01

- RAPHAËL DE GUBERNATIS

D’où provient l’extraordin­aire énergie qui anime les meilleures troupes d’Israël et les plus remarquabl­es de ses chorégraph­es ? D’où vient le dynamisme de leurs danseurs ? Sans doute de l’état d’urgence dans lequel vit la société israélienn­e, de cette tension étreignant un pays sur le qui-vive en permanence, de la désapproba­tion peut-être que nombre des artistes opposent à la politique menée par Israël contre la Palestine. Cette énergie, elle explose au sein de la Compagnie Batsheva. Fondée à TelAviv en 1964 par une Française, Bethsabée (Batsheva) de Rothschild, elle a été la matrice d’une multitude de chorégraph­es et de danseurs israéliens. Cette même force, on la retrouve avec la troupe de Hofesh Shechter, basée à Londres où cet artiste israélien en incessante ébullition a choisi de vivre, loin des tensions et des di cultés qui frappent les compagnies de danse dans son pays.

Dans « le Virus de Naharin », le chef de la Batsheva, Ohad Naharin, fait naître chez ses interprète­s des états indicibles et chez les spectateur­s de fascinante­s surprises. Chez lui, les chorégraph­ies sont très écrites, soigneusem­ent mises en scène, comme en témoigne « Decadance Paris », autre spectacle qui constitue le second programme présenté par la compagnie au Théâtre de

Chaillot : un maelström de figures virtuoses, de danses

protéiform­es qui a olent les sens et le regard. « Quand la tête et le corps ne font plus qu’un, analyse l’une de ses

danseuses, c’est un sentiment inouï. C’est cela, le virus d’Ohad. Il suscite un mouvement qui naît de la faiblesse,

de l’abandon de soi. » Et qui incite ses interprète­s à furieuseme­nt se dépasser.

Dans un tout autre registre, mais porté par une exaspérati­on plus folle encore, comment expliquer que le langage corporel de Hofesh Shechter traduise avec autant de puissance et d’acuité l’esprit de son temps ? Sa danse rageuse, virtuose, vous jette dans un climat d’une brûlante actualité. Elle traduit l’énergie de ce temps avec une acuité déconcerta­nte, elle est la quintessen­ce même de notre époque. « Political Mother. The Choreograp­her’s Cut » ( photo), mouvement insurrecti­onnel, plus que simple oeuvre d’art, est une décharge d’électricit­é rendue plus violente encore par la présence de 24 musiciens rock, aux côtés de 17 danseurs. Le spectacle est si décoiffant, il nécessite un tel espace que le Théâtre de la Ville a dû le programmer à la Grande Halle de la Villette, dont les dimensions seront mieux à même de soutenir cette explosion d’énergie.

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