L'Obs

Chefs-d’oeuvre du XX siècle

JUSQU’AU 6 JUILLET, FONDATION LOUIS-VUITTON, PARIS-16 , RENS. : 01-40-69-96-00.

- BERNARD GÉNIÈS

Il n’est pas si fréquent de voir réunis dans une même institutio­n autant de tableaux ou de sculptures que l’on désigne communémen­t comme des chefsd’oeuvre. De fait, dans cet ensemble comportant les créations d’une vingtaine d’artistes, il conviendra­it plutôt de parler d’oeuvres emblématiq­ues traduisant, dans l’histoire de l’art, une suite de ruptures ou d’a rmations posées au cours du XX siècle. En un temps où l’e et de nouveauté, allié aux e ets spectacula­ires du marché, fi nit par l’emporter le plus souvent sur toute autre considérat­ion, le visiteur est invité à e ectuer en quelque sorte un retour sur images. Aux fondements mêmes de ce que furent les révolution­s qui ont ébranlé (pour la bonne cause) le champ de l’art moderne. Les six salles de ce parcours évoquent des thèmes (la musique, la contemplat­ion, le « popisme ») venant faire écho à la collection contempora­ine Louis Vuitton. L’accrochage, sobre et élégant, ose des confrontat­ions subtiles. Ainsi verra-t-on dans la première salle l’une des versions du célèbre « Cri » de Munch voisiner avec des autoportra­its de l’artiste fi nlandaise Helene Schjer eck, deux « Etudes » de Francis Bacon et le fameux « Portrait de la danseuse Anita Berber » d’Otto Dix. Nul chapitre de l’histoire de l’art ne rapproche ces oeuvres, et pourtant, présentées comme elles le sont, elles témoignent d’une violence créatrice liée à l’expression d’une nécessité impérieuse, qu’elle soit politique (comme pour Malevitch, présent ici avec son « Pressentim­ent complexe ») ou plus intime (avec Munch ou Schjer eck). La suite du parcours est à l’avenant, à l’image de ces trois tableaux de Mondrian de 1909 (des vues de bord de mer) « encadrés » par des paysages marins d’Emil Nolde réalisés en 1916 : il ne s’agit pas ici d’opposer l’un et l’autre, mais au contraire de mettre en lumière, chez chacun, leur technique picturale – et, notamment, l’usage qu’ils font de la couleur. On retrouve à nouveau Mondrian (mais cette fois c’est celui des « Compositio­ns ») dialoguant avec le « Carré noir », le « Cercle noir » et la « Croix noire » de Malevitch. Puis Bonnard face à un magnifi que Rothko de 1957 et à un ensemble de Picasso du début des années 1930. Léger, Picabia, Matisse ( ci-dessus, sa célèbre « Danse » du Musée de l’Ermitage a fait le déplacemen­t), Kandinsky fi gurent aussi parmi la liste des prestigieu­x invités de cette exposition dont la commissair­e, Suzanne Pagé, a rme qu’elle doit être « ressentie et contemplée ». Ce sont là deux verbes justes.

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