L'Obs

R.I.P. Virginia

PAR WILLIAM FITZSIMMON­S (GRÖNLAND).

- GRÉGOIRE LEMÉNAGER FRANTZ HOËZ J. D.

Ceux qui apprécient l’art dépouillé de Su an Stevens sur son dernier disque (le très beau « Carrie & Lowell ») ont gagné le droit de jeter une oreille à ce bref album du barbu de Jacksonvil­le : composé en trois jours à la mort de sa grand-mère Virginia, c’est un retour à la Pennsylvan­ie natale porté par une douce mélancolie, de jolis arpèges de guitare qui tournent en boucle comme sur certains des premiers morceaux de Ben Harper et, parfois, une sorte de boîte à rythme qui agit comme un métronome lancinant. Là-dessus, la voix de Fitzsimmon­s, fragile mais entêtante : elle murmure, frémit, gémit, sans sucreries inutiles, pour méditer sur le passage des années et les remords d’un garçon qui a tenté de mener sa barque loin des siens. Savoir que ce songwriter délicat est le fils de deux musiciens aveugles ajoute à l’impression d’avoir a aire à un homme qui cherche la lumière, à tâtons, dans la pénombre ; et qui la trouve en chantant.

Le chanteur Byron Blum porte bien son nom. Dans le premier album de Pow!, il dénonçait avec « Hi-Tech Boom » la hausse immobilièr­e de San Francisco due à la netéconomi­e. Ce groupe punk alliant synthé et guitares fuzz baigne dans une ambiance de paranoïa et de malaise inquiétant. Dans ce nouvel opus tout aussi fascinant, il délivre un véritable assaut sonique sur lequel Melissa Blue insuffle ses lignes entêtantes et mélodiques de claviers (« Liquid Daydream »). A noter que Seth Sutton, le batteur, chante dans un autre excellent groupe du coin, les Useless Eaters. Parfait pour affronter la ville. En concert au festival Villette Sonique le 23 mai.

Nous voilà (momentaném­ent) débarrassé­s des sempiterne­lles sonates pour violon de Fauré, SaintSaëns et Franck, qui sont évoquées dès qu’on parle de Proust-et-la-musique. Enfin des liens plus subtils, plus profonds! Plus amusants, aussi. Et dénoués lentement, patiemment, par un long texte qui est presque un livre, dû à James Connelly, proustien américain de son état. Nos deux pianistes cognent avec passion – on les aimerait plus raffinés. Et plus généreux aussi (57 min et 20 s, c’est peu, d’autant qu’ils coupent dans ces oeuvres de Bizet, Debussy, Beethoven, Schubert, Fauré, Stravinsky). Mais côté coordinati­on, ce sont des chefs.

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