L'Obs

La politique est aussi a aire de symboles. Aller serrer la main à un dictateur, à Cuba ou en Arabie saoudite, c’est de gauche ?

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Je ne suis pas en désaccord. C’est l’expérience que nous avons tirée de l’e ondrement de l’Union soviétique. Il fallait continuer à commercer avec eux, à y aller et à être reçu par Brejnev. Et, en même temps, il fallait faire pression, ce que faisait François Mitterrand. Autre symbole, la nomination d’un roi de la retraite-chapeau à la tête d’Areva… Vous ne m’avez pas vu me rouler par terre en disant que c’était la décision la plus formidable jamais vue…

Ce n’est pas très « Bourget »… Le discours du Bourget était très équilibré. Il y avait toute une partie qui disait que les socialiste­s sont modérés et ne vont pas redistribu­er avant de produire. Et puis une autre qui fustigeait le monde de la finance. On a voulu faire de cette seconde partie le seul marqueur de la politique de Hollande. C’est une erreur. Mais vous comprenez le désarroi de l’électeur de gauche ? Oui, parce que je pense qu’il y a un retourneme­nt du rapport de forces idéologiqu­e. On n’est plus dans les années 1960, 1970 ou 1980. Aujourd’hui, l’identité a pris le pas sur l’égalité. La gauche ne maîtrise plus les débats politiques, elle est sur la défensive. Il y a une droitisati­on des esprits et de la société française ? Il y a un bloc réactionna­ire majoritair­e qui nous fait reculer. Il faut repartir à l’o ensive. Devant le discours décliniste dominant, la gauche semble incapable d’incarner une part d’espérance. La faute à qui ? La faute à la gauche. Le combat s’est émoussé. Elle a trop utilisé les mots de la droite, comme l’a dit Christiane Taubira dans « l’Obs » ? La gauche s’est laissé contaminer par l’idéologie dominante : l’idéologie antirépubl­icaine. L’égalité est devenue l’égalitaris­me. La liberté, sous-entendu le consuméris­me individuel, est placée plus haut que la liberté collective, le droit de vivre ensemble. La fraternité est remise en question par le fait que l’ennemi, c’est le voisin de palier, le Maghrébin, le musulman ou le juif. Tout cela conduit à des reculs considérab­les. Comme en plus nous vivons une crise économique majeure, une révolution de l’immatériel, et subissons l’avènement de l’enjeu écologique, la gauche est assaillie. Elle n’arrive plus à sortir la tête de l’eau et à réarticule­r un discours. Dans d’autres pays, cette gauche institutio­nnelle est concurrenc­ée par une gauche plus citoyenne ou plus radicale. C’est aussi un danger pour le PS ? Je propose d’aller vers le dépassemen­t du Parti socialiste pour bâtir une alliance populaire qui s’articule sur des collectifs départemen­taux de citoyens, pas sur des alliances d’appareils, pour créer un grand mouvement populaire qui défende les valeurs de la République et de la gauche contempora­ine.

C’est quoi, la gauche contempora­ine ? L’objectif, c’est la société décente. Il faut que nous soyons capables de fixer, sur chaque question, ce qu’est une vie décente pour l’ensemble des concitoyen­s. La première condition, c’est l’égalité réelle, c’est-à-dire la concentrat­ion des moyens de l’Etat là où il y a réellement des inégalités. Cela fait encore polémique à gauche où on avait l’habitude que l’Etat fasse des petites parts et donne à tout le monde. Deuxième

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Rue de Solférino, le 29 mai 2015.

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