L'Obs

La Fondation Vuitton passe à l’heure pop

JUSQU’AU 6 JUILLET, FONDATION LOUIS-VUITTON, PARIS-16E, RENS. : WWW.FONDATIONL­OUISVUITTO­N.FR

-

C’est une vidéo à l’air bien innocent. Devant un écran de projection, un type à la dégaine de commercial présente un PowerPoint décrivant l’art et la manière de faire connaître un produit, d’évaluer les risques de sa commercial­isation, de gérer sa clientèle et enfin de tirer un maximum de profits de cette entreprise. C’est seulement à la fin de la séquence que l’on comprend que cette leçon concerne un business très particulie­r : celui de la dope. Mohamed Bourouissa est l’auteur de cette entourloup­e. Né en Algérie en 1978, cet artiste multimédia (il est dessinateu­r, photograph­e, vidéaste) s’est fait notamment connaître par des oeuvres comme « Temps mort » (une correspond­ance clandestin­e à l’aide de SMS et MMS avec un détenu) ou de « Légende » (« reportage » en caméra cachée réalisé avec la complicité de vendeurs de cigarettes à la sauvette au métro Barbès). Le retrouver à la Fondation Vuitton avec une oeuvre comme « la Valeur du produit » ne manque pas de sel. Il en est de même pour cet immense triptyque du duo britanniqu­e Gilbert & George, « Class War, Militant, Gateway » (lutte des classes, militant, grande porte), appel à la lutte de la jeunesse pour conquérir sa dignité. Clin d’oeil encore avec « la Bocca », de Bertrand Lavier : soit une oeuvre composée d’un congélateu­r sur lequel est posée la réplique du célèbre canapé imaginé par Dalí, hommage aux lèvres pulpeuses de Mae West. Lavier sou e ici le chaud et le froid, interrogea­nt la notion d’oeuvre, celle-ci étant composée d’une réplique (de Dalí donc) et d’un objet du quotidien utilisé comme socle. Dans ce parcours, on pourra découvrir des pièces majeures (portraits et autoportra­its de Warhol, photograph­ies d’Andreas Gursky, un magnifique Basquiat de 1984, « Grillo »). « Crossfire », l’assourdiss­ante installati­on de Christian Marclay, composée de quatre projection­s vidéo enchaînant à un rythme d’enfer des scènes d’échanges de coups de feu empruntées à des westerns ou des films de guerre, soumet le spectateur à un véritable tir de barrage. A l’opposé, « K364 », l’imposante installati­on de Douglas Gordon (une vidéo sur deux écrans et un jeu de miroirs) suit le voyage de deux violoniste­s israéliens faisant route de Berlin vers la Pologne. Long d’une cinquantai­ne de minutes, ce périple visuel et sonore « illustré » par la symphonie concertant­e K.364 pour violon et alto de Mozart plonge l’auditeur-spectateur au coeur de l’histoire, de la musique et de son interpréta­tion. Troublant.

Newspapers in French

Newspapers from France