L'Obs

Fin de party à Kazantip

Les nouvelles autorités russes de Crimée ont interdit le festival de musique électroniq­ue le plus déjanté de la planète. Trop subversif

- DE NOS ENVOYÉES SPÉCIALES À POPOVKA, ELENA BRUNET ET SARAH DIFFALAH

leg Mishuris nous a donné rendez-vous sur la plage, une heure avant le coucher du soleil. A 19 heures, la températur­e, qui frôlait les 40 degrés dans l’après-midi, a baissé d’un cran. Un homme déguisé en nonne, haut-parleur à la main, distribue des ballons orange gonflés à l’hélium. Une enceinte, posée sur une estrade blanche futuriste, laisse échapper une deep trance planante. Une centaine de jeunes, entre bling-bling moscovite et style hippie, s’agglutinen­t sur les marches du podium. Sur le sable fin, au bord d’une mer Noire aux eaux claires et calmes, ils attendent religieuse­ment les dix coups de gong, frappés par un gourou habillé de vert. Derrière eux, la police anti-émeute, les légendaire­s OMON, bras croisés, se fait discrète. Un instant de répit. Lorsque le soleil disparaît dans la mer et que le dernier gong a retenti, le public fait un voeu, lâche les ballons, applaudit, s’embrasse. C’est le début de la nuit, le début des folies. « Si tu rates le coucher du soleil, ta soirée ne sera pas bonne », avertit Oleg.

Chaque soir, ce même rituel lance les festivités dans le village de Popovka, petite station balnéaire de Crimée occidental­e. Une vieille tradition de Kazantip, grand raout annuel de musique électroniq­ue qui se déroule la première quinzaine d’août, chaque année, depuis le début des années 1990. Oleg, manager chez Vodafone en Allemagne, ukrainien d’origine, est l’un des organisate­urs de ce festival, sur lequel il planche depuis des mois. Mais, cette année, les festivités ont un goût amer. Ce 31 juillet, jour de l’ouverture, dès la tombée de la nuit, des policiers sifflent la fin de la partie. La joyeuse foule haute en couleur se dirige vers la sortie, résignée. Ils ne pourront pas faire la fête sur la plage. Le festival a été interdit à la dernière minute par les nouvelles autorités russes de Crimée : trop

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