L'Obs

La marquise de Nothomb

L’auteur de “Pétronille” raconte le désarroi d’un aristocrat­e, obligé de commettre un crime lors d’une garden-party

- DIDIER JACOB

Pétronille est morte, vive Sérieuse! Amélie Nothomb a le don des titres et le goût des noms à coucher dehors. C’est du reste ce que fait l’héroïne de son roman. Qui est Sérieuse ? Une adolescent­e en rupture, fille d’un couple d’aristos épanouis. Elle s’échappe, à la nuit tombée, du château du Pluvier, dans les Ardennes belges, pour avoir froid, peur, ressentir quelque chose. C’est que la petiote n’éprouve rien. Ni peine ni joie. Ni tristesse, ni remords, ni passion pour quoi que ce soit. Le hasard veut qu’elle soit secourue par une voyante énergique et rondelette, Rosalba Portenduèr­e. Le comte Neville, son père, vient donc récupérer Sérieuse dans le cabinet de l’astrologue. Il a d’autres soucis en tête : son château, qu’il doit vendre faute des crédits nécessaire­s à son entretien. Avant de le quitter, Neville et sa femme organisent leur ultime garden-party annuelle, histoire de montrer qu’ils excellent toujours dans l’art délicat de recevoir. Problème : la Portenduèr­e a prédit que le comte assassiner­ait l’un de ses invités. Le maître des lieux se persuade qu’il en sera ainsi. Mais autant choisir la bonne victime. Sérieuse est candidate et le lui fait savoir. D’en avoir assez du néant de sa vie la rend touchante, pour une fois. Le comte promet qu’il abrégera ses sou rances, en mettant fin à ses jours pendant le petit intermède musical qu’il prévoit d’o rir, dans le parc, à ses invités. Du dénouement on ne dira rien. Allez, un indice tout de même, que comprendro­nt les lecteurs lorsqu’ils termineron­t l’ouvrage : Schubert. Aussi enjoué que le précédent, et démarrant formidable­ment, le roman d’Amélie Nothomb séduira les amateurs de best-sellers autant que les professeur­s de sémiotique – si cette discipline, en vogue dans les années 1980, existe encore. C’est que l’histoire qu’elle raconte est à la fois plaisante et abstraite, confite comme la tomate séchée dans son strict minimum narratif. Dès qu’elle touche à son terme, Amélie Nothomb s’en désintéres­se d’ailleurs et conclut l’a aire à la hussarde. Le mort n’est pas celui qu’on croit et, comme dans les contes de fées, tout est bien qui finit bien au château du Pluvier.

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