L'Obs

CE SENTIMENT DE L’ÉTÉ PAR MIKHAËL HERS

- JÉRÔME GARCIN

Drame français, avec Judith Chemla et Anders Danielsen Lie (1h46).

Soudain l’été dernier, aurait dit Mankiewicz, qui filmait comme personne les invisibles états d’âme. Soudain, au coeur de l’été, Sasha s’écroule dans un jardin berlinois. De battre, son coeur s’est arrêté. Elle avait 30 ans, une vie d’artiste peintre devant elle, et un compagnon traducteur, Lawrence (Anders Danielsen Lie), qui accueille à Berlin la famille française de la disparue, dont sa soeur, Zoé (Judith Chemla, au centre, photo). Les deux étés suivants, d’abord à Paris, ensuite à New York, le réalisateu­r de « Memory Lane » filme en Super16 les retrouvail­les de Lawrence et Zoé, qui sont liés par le souvenir de Sasha et se demandent comment vivre avec cette absente omniprésen­te. Petits arrangemen­ts avec une morte. Il ne se passe rien de décisif, et pourtant tout passe, dans ce beau film sur le regret où les vivants errent sous le soleil comme des ombres pressées, où le bonheur est une indécision et la beauté des grandes villes désertées, un réconfort. Il s’agit pourtant moins, ici, du travail du deuil que du travail du temps: on voit lentement, impercepti­blement, les personnage­s évoluer, s’alléger et revenir, en douceur, dans le monde réel où l’on vend des burgers et des fripes, où l’on danse et boit, où l’on joue au handball et fait l’amour. C’est d’une délicatess­e rare. Même la pellicule est impression­née.

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