L'Obs

LES BONNES MANIÈRES

L’Homo politicus nouveau

- Par SÉVERINE DE SMET

Alors qu’on pointe régulièrem­ent le sexisme en politique en dénonçant les attaques sur les tenues des élues, voilà que certains hommes en prennent aussi pour leur grade. L’image classique du politicard, avec costume, cravate, chemise blanche et souliers propres, n’est plus qu’un vieux souvenir. Désormais, il y a ceux qui soignent à l’excès leur image, grâce à laquelle ils font passer leur message, et ceux qui a chent une indi érence complète à l’égard de leur style et de tous ceux qui pensent qu’ils n’ont pas le bon look. Ainsi, mi-janvier, les clichés du nouveau Congrès des Députés espagnol ont fait le tour de la Toile et des journaux. Ce n’était pas tant l’arrivée de Podemos, parti de gauche radicale arrivé troisième des su rages avec 65 députés (face à 89 députés socialiste­s et 119 du Parti populaire de Mariano Rajoy), qui a retenu l’attention. Mais davantage, dans ce décor aux dorures et bois précieux du Palacio de las Cortes, Carolina Bescansa et son nouveau-né en poussette, les dreadlocks d’Alberto Rodríguez et de Miguel Ardanuy (ce dernier a même dû se défendre d’une quelconque invasion de poux), le visage poupon d’Iñigo Errejón, 32 ans, la queue-de-cheval du charismati­que Pablo Iglesias ou les boucles préraphaél­ites de Miguel Vila. Un étonnant coup de jeune, un débarqueme­nt rafraîchis­sant de la société civile. En France, la révolution capillaire n’a pas encore eu lieu. Mais le coup de la barbe tenté par Emmanuel Macron en janvier a émoustillé la classe politique. Même son collègue Bernard Cazeneuve, déjà réputé pour l’élégance de ses pochettes, de son feutre et de son manteau beige, s’est fendu d’un petit commentair­e stylistiqu­e. « Le regard des médias est beaucoup plus porté sur le paraître, c’est indéniable, souligne Samir Hammal, professeur à Sciences-Po et créateur du cours “Mode et politique”. Mais cela s’explique aussi par le rajeunisse­ment de la classe politique. » Ainsi Justin Trudeau, Premier ministre du gouverneme­nt canadien depuis un peu plus de cent jours, se présente comme l’homme du renouveau politique, à la Kennedy. A 44 ans, fils bien né, marié à une animatrice de télévision avec qui il a trois jeunes enfants, il surfe sur une popularité durable grâce à ses idées et ses propositio­ns mais également à son physique, qui lui vaut le titre de « PMILF », croisement de Premier ministre et de « MILF » (acronyme d’habitude utilisé pour les femmes…). Outre son programme, on peut aussi trouver sur le Net son gentillet strip-tease réalisé lors d’un gala de charité, ou un sweat-shirt le présentant en cow-boy héroïque. Le swag en politique touche également l’Asie : à Taïwan, Freddy Lim a été élu législateu­r d’un district de Taipei. Cet activiste de longue date, membre du NPP, est aussi un très renommé chanteur de heavy metal… Nuque longue et tempe rasée, il arbore, en outre, de nombreux tatouages. Qui a dit que la politique n’était pas rock and roll ?

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LE MÉTALLEUX.
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FREDDY LIM, LE MÉTALLEUX. EMMANUEL MACRON, OÙ LA BARBE DE LA DISCORDE.
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PABLO IGLESIAS, LE LEADER À LA QUEUEDE-CHEVAL.
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MIGUEL ARDANUY A L’HABITUDE QU’ON LUI CHERCHE DES POUX.
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