Les ennemis du Tafta
IPHIGÉNIE Par devoir moral, Angela Merkel est prête à se sacrifier. En Allemagne, l’opinion a pris en grippe le Tafta : seuls 17% des Allemands le soutiennent, contre 55% il y a deux ans. Syndicats, églises, SPD, associations, tous ont pris leurs distances. Mais la chancelière, contre vents et marées, continue de négocier. Et Obama peut la situer publiquement « du bon côté de l’Histoire ».
BRUTUS François Hollande est en plein dilemme cornélien, déchiré entre son devoir (rester loyal à Merkel, soutenir le projet d’accord) et son ambition (réaliser un beau coup politique en faisant dérailler le Tafta). « Nous avons tout à gagner à aller vite [dans la négociation] », disait-il encore il y a deux ans, quand il s’agissait d’attirer les bonnes grâces d’Obama. Aujourd’hui, il menace de ne pas signer l’accord, agaçant ses partenaires américain et allemand.
CYRANO Epée au clair, Barack Obama était en Allemagne la semaine dernière pour faire avancer les négociations sur le Tafta, traité de libre-échange commercial euro-américain négocié depuis trois ans. Il sait pourtant que cet accord n’a aucune chance d’être bouclé et ratifié sous son mandat (qui se termine en janvier) et que les di érents candidats à sa succession le dénoncent. Alors, avec panache, il lance des tirades alambiquées : « Je ne m’attends pas à ce que nous soyons en mesure de finir la ratification d’un accord d’ici à la fin de l’année, mais je prévois que nous ayons terminé les négociations en vue de l’accord. »
L’INGÉNUE La Suédoise Cecilia Malmström, commissaire européenne au Commerce et responsable de la négociation, envisage déjà une « pause ». Elle constate que Merkel a discuté avec Obama alors qu’elle-même n’a pas été conviée à la réunion. Mais elle relativise et arrive encore à dormir, ce qui n’était pas le cas quand elle était chargée de la question des réfugiés. Au moins, personne ne se noie.
SCARAMOUCHE Ne vous fiez pas à ses rondeurs et à sa discrétion : Matthias Fekl (38 ans, normalien, énarque, franco-allemand) est agile, malin et pugnace. Depuis des semaines, le secrétaire d’Etat au Commerce extérieur ne cesse, dans l’ombre, de planter des banderilles dans le projet de traité, poussant son maître Hollande à lui porter l’estocade. Il est convaincu que l’accélération des discussions se ferait au détriment de la France. Et de la gauche.