L’“affaire Walter”
A première vue, l’a aire paraît entendue : un directeur qui a vu son salaire à la Villa Gillet passer en cinq ans de 4 500 à 6 000 euros net, un salaire de 3 500 euros net mensuels pour la direction des Subsistances, des notes de frais jugées trop élevées en 2013, des événements coûteux de l’autre côté de l’Atlantique… Dans le sillage du quotidien « le Progrès » qui révélait le contenu d’un rapport provisoire de la chambre régionale des comptes (CRC), les médias ont eu tôt fait de tirer à boulets rouges sur Guy Walter, 60 ans, ancien professeur de lettres sacré « prince des arts et de la dépense publique » après avoir été longtemps encensé pour l’organisation, dans le cadre de la Villa Gillet, d’événements aussi incontournables que les Assises internationales du Roman ou le Festival Mode d’Emploi. Son bilan ? Une fréquentation doublée pour la seule période 2008-2013, et des institutions nimbées d’une aura inédite.
De fait, le « dossier Walter » est plus complexe qu’il n’y paraît : comme le rap- pelait dans une tribune Denis Trouxe, exadjoint au maire de Lyon, « les directeurs de l’Opéra, de l’Orchestre national de Lyon, de l’Orchestre de l’Opéra, du Théâtre des Célestins, avaient des rémunérations largement supérieures en francs constants, alors que Guy Walter dirige deux établissements ». L’intéressé, sans augmentation salariale pendant dix ans malgré une charge de travail sans cesse accrue, n’a de surcroît jamais voulu profiter aux Subsistances d’un vaste appartement de fonction, préférant transformer les lieux en deux résidences d’artistes… Quant aux frais conséquents, force est de constater que ceux-ci, engendrés par la lourde organisation du Festival Walls and Bridges à New York, ont été divisés par trois lorsque cet événement a pris fin. Pour mener à bien cette mission, Walter avait perçu une « prime exceptionnelle » de 1 500 euros mensuels, devenus complément de salaire lorsque, face au succès de Walls and Bridges, la manifestation fut reconduite deux années supplémentaires puis transformée, à Lyon, en Festival Mode d’Emploi. Mais de cela, la CRC ne sou e mot, préconisant plutôt la réservation d’un hôtel new-yorkais à « 63,30 euros la nuitée » et se montrant plus encline à pointer du doigt un événement « qui n’a pas eu les retombées espérées pour les auteurs français ». Un jugement subjectif qui fait peu de cas d’une série d’articles élogieux pour nombre de nos écrivains et artistes, parus notamment dans le « New Yorker », le « New York Times » ou « Time Out », sans parler de la presse hexagonale.
Suite au rapport, les élus locaux, Les Républicains en tête, n’ont guère tardé à évoquer une « gabegie » pour suspendre leur subvention et menacer la Villa Gillet. Avec un président de région qui déclare « apprécier énormément Zemmour », juge le régime des intermittents « pervers » et « inacceptable », et parlait pendant sa campagne de supprimer l’Agence Rhône-Alpes pour le livre et la documentation, on peut en e et craindre le pire.