L'Obs

Les débats sont ouverts

Où l’on voit qu’il ne faut surtout pas se priver

- D. D. T.

On meurt beaucoup en Irak, d’ailleurs comme partout, mais à ces morts habituels s’ajoutent les victimes de la guerre régionale et celles du terrorisme interne. Ce qui finit par faire énormément. La justice en rajoute, son ministre l’annonce sur le ton du contenteme­nt (« Justice est faite. ») : 22 condamnés ont été exécutés en Irak le mois dernier. Pendant la totalité des quatre mois précédents, estime Amnesty Internatio­nal faute de chi re o ciel, il y en avait eu 25, soit quatre fois moins sur la durée. L’e cacité gouverneme­ntale cesse donc d’être un vain mot dans ce pays en proie au désordre, et il est heureux que ses services administra­tifs, non seulement soient enfin en mesure de procéder à davantage d’exécutions capitales mais encore capables d’en donner un recensemen­t fiable, prélude à une paix civile que chacun appelle de ses voeux.

Ce sont surtout les animaux qui ont fait parler d’eux cette semaine. Il y a d’abord eu les ours de cette forêt japonaise aux abords de laquelle un père et une mère de famille avaient débarqué de leur voiture leur garçon de 7 ans qui s’y montrait insupporta­ble et lorsqu’ils étaient revenus le reprendre, il avait disparu. Forêt presque impénétrab­le, où ils avaient pénétré en tremblant, voilà ensuite qu’ils ne le retrouvaie­nt pas. Le monde entier fut bientôt aux abois, cette histoire rappelait trop l’aventure du Petit Poucet mais avec cette fois la présence des ours qui remplaçaie­nt l’ogre, l’ogresse et leurs sept petites filles. Il y avait de quoi lâcher des considérat­ions sur la sévérité de l’éducation au pays du SoleilLeva­nt. On ne s’en priva pas. Gendarmes japonais, pompiers, chiens policiers, hélicoptèr­es de chercher l’enfant pendant cinq jours. Au sixième, un soldat le découvrit dans un campement militaire déserté. Il n’avait pas rencontré d’ours, il était en bonne santé et s’il avait voulu se venger de ses parents en leur faisant croire qu’il était mort, il avait réussi. Ne fut-ce pas un jour ou l’autre notre rêve d’enfant à tous ?

Celui-ci était plus jeune, il était âgé de 3 ou 4 ans. Sa petite taille, échappant à la surveillan­ce, lui permit de se glisser sous une clôture et d’aller à la rencontre, non pas des ours comme l’enfant japonais, mais du gorille, attraction d’un zoo de Cincinnati. Au vrai, le gorille occupe une fosse que le bambin dut dévaler bien malgré lui. Construite pour que le gorille s’y ébatte au grand plaisir de ses frères humains, il tombe dans une mare, en grand danger de s’y noyer. Le gorille de l’en tirer, de le prendre dans ses bras. C’est un mâle, il est maladroit. Les visiteurs du zoo s’amassent à l’entour de l’enclos. Plutôt que de faire silence, ils manifesten­t à grands cris chaque fois que le gorille a un mouvement un peu brusque. Quand il s’éloigne et disparaît derrière un rocher, c’est un hurlement de terreur. Que va-t-il lui faire? C’est aussi ce que se demandent les gardes, ils décident de ne pas prendre de risques pour l’enfant, d’abattre le gorille d’un coup de feu. L’enfant est sauf. Fallait-il épargner la bête? Le débat est métaphysiq­ue, on ne s’en priva pas. Oubliant qu’un enfant qui nous échappe cela arrive à tous, fallait-il accabler la mère ? On s’en priva encore moins. Quelques jours plus tôt, dans un zoo du Chili, ce sont deux lions qui avaient été abattus pour sauver un homme nu descendu parmi eux pour une raison connue de lui seul. Valait-il la mort des lions, ne nous privons pas du débat. Sans parler de ceux qui disent qu’un lion n’a pas sa place au Chili, encore moins dans un zoo, ni un gorille dans l’Ohio. Ces animaux selon eux seraient mieux dans leurs pays respectifs, à la campagne. Ça aussi, c’est un débat.

Si vous croyez que les kangourous se posent autant de questions! Deux amies se promenaien­t à bicyclette sur une route d’Australie. Un kangourou saute sur l’une, la brutalise, saute sur la bicyclette de l’autre, la fait tomber pareilleme­nt mais elle s’en sort sans dommage, la première a trois côtes cassées et ses implants mammaires ont fait les frais de l’aventure. Ces implants sont-ils bien nécessaire­s ? Chouette, un débat.

On ne s’en priva pas

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