Qui sera l’égérie de L’Idéal?
L’IDÉAL, PAR FRÉDÉRIC BEIGBEDER. COMÉDIE FRANÇAISE, AVEC GASPARD PROUST, AUDREY FLEUROT, JONATHAN LAMBERT (1H30).
Peu après que les trois bombes qui le câlinaient sur son lit sont sorties de sa chambre, le petit garçon se lève à son tour et, guidé par la musique et les bruits de la fête, déboule en pyjama dans le salon gigantesque. Il est peuplé de dizaines d’autres filles nues ou à demi nues et d’invités qui s’étreignent, s’ignorent, s’alcoolisent, se droguent. Belle ouverture filmée d’un seul élan, dont il convient de jouir sans barguigner : car la suite peine davantage à convaincre. La suite ? Eh bien, le petit garçon est devenu grand. Il vit toujours au milieu des plus belles filles de la planète : Octave Parangon (Gaspard Proust, photo) écume les contrées les plus reculées de la Russie, à la recherche de celles dont il fera les mannequins de l’agence d’un oligarque. Mais voici qu’une sextape met fin brutalement à la carrière de l’égérie de la grande marque de cosmétiques L’Idéal. Vite, il faut en trouver une nouvelle, « caucasienne » (blanche), très jeune, et vierge. Octave est appelé à la rescousse. Il se met en chasse en compagnie d’une directrice de la marque (Audrey Fleuriot, photo). A la tête de L’Idéal se tient un travesti (Jonathan Lambert). L’histoire et les pratiques de cette marque au nom transparent sont mises en cause sans timidité, l’audace est à saluer, mais Octave Beigbeder et Frédéric Parangon ne parviennent pas à se dépêtrer du paradoxe qui les fonde : ils font un métier épouvantable et mènent une existence débilitante (c’est ce qu’a rme le film), seulement ce métier les intoxique et cette vie les fascine.
« L’Idéal » balance ainsi entre cynisme et sentimentalisme, entre le point de vue du gaillard et celui de la midinette, les deux encombrés d’une complaisance identique, tantôt « parce que je le vaux bien », tantôt « parce que je ne vaux rien », et il est assez naturel que le partage entre scènes de vie et clips publicitaires (exécutés avec un certain éclat) se fasse mal. Quant à la distribution, à l’exception notable d’Audrey Fleurot, très charmante et amusante, elle apparaît sans tarder un peu juste, rendant plus di cile encore une empathie avec les personnages dont il n’est pas certain, à dire vrai, que l’auteur la recherche. De tout cela, que reste-il au terme de ces quatre-vingt-dix minutes qui souvent paraissent longues ? Le sentiment que la frivolité du monde dépeint a déteint sur le film et que, du coup, la charge contre des usages et des comportements indécents se révèle rien moins qu’ino ensive.