MONDOVISION
Je ne pensais pas qu’un jour un candidat sérieux pour la présidence des Etats-Unis pourrait constituer une véritable menace pour la sécurité du monde occidental. Mais voilà où nous en sommes »… Sur son compte Twitter, Carl Bildt, l’ancien Premier ministre et chef de la diplomatie suédoise, un homme de droite considéré comme un fervent atlantiste, ne cache pas son dépit. C’est évidemment à Donald Trump qu’il fait référence, après les déclarations désinvoltes du candidat républicain à la Maison-Blanche sur la sécurité des Etats baltes, son invitation à la Russie à hacker les e-mails de sa rivale démocrate, Hillary Clinton, ou encore ses tirades contre l’islam.
Ce qui e raie Carl Bildt, mais aussi la quasi-totalité de l’establishment américain de politique étrangère et les chancelleries des pays alliés des Etats-Unis, ce ne sont pas tant les positions hétérodoxes de Donald Trump que son inculture abyssale sur le reste du monde et sur ses enjeux stratégiques. Il faut lire la retranscription intégrale de l’entretien du candidat républicain avec David Sanger et Maggie Haberman dans le « New York Times », parue le 21 juillet, pour le réaliser. La liste de ses approximations et de ses a rmations gratuites ou vagues est infinie, tout comme sa posture narcissique, qui réduit les relations internationales à l’estime personnelle de Donald Trump pour tel ou tel dirigeant, au hasard Vladimir Poutine ou Recep Tayyip Erdogan.
C’est évidemment la relation de Donald Trump avec la Russie de Poutine qui inquiète le plus. La légèreté avec laquelle le candidat républicain à la MaisonBlanche a évoqué une possible intervention de la Russie chez ses voisins baltes sans que s’applique automatiquement la protection garantie par l’article 5 du traité de l’Otan a semé l’e roi dans ces pays qui se pensaient protégés. Tout aussi intrigante est la modification in extremis de la plateforme républicaine pour l’élection de novembre, pour en retirer le passage très dur sur l’Ukraine. Le mélange d’amateurisme et d’« apaisement » peine à produire une politique étrangère et de sécurité très cohérente.
Pour cette raison, les experts internationaux de la mouvance républicaine ont déserté, et certains apportent désormais leur soutien à Hillary Clinton. Parmi eux, on trouve quelques néoconservateurs comme Robert Kagan, fervent partisan de l’intervention en Irak en 2003, qui participait récemment à un dîner de levée de fonds baptisé « Les professionnels de politique étrangère pour Hillary Clinton »… D’autres personnalités républicaines pourraient suivre cette voie, comme Colin Powell, l’ancien secrétaire d’Etat de George W. Bush.
Et c’est là toute l’ambiguïté de la candidate démocrate : si elle est assurément plus rodée, plus compétente sur les questions internationales, est-elle pour autant plus « rassurante » ? Hillary Clinton a en effet une vision très « guerre froide » du monde, avec la volonté de « contenir » Moscou et Pékin, une ferveur messianique sur le modèle américain, et un penchant interventionniste à l’ancienne. Si la prudence de Barack Obama a laissé faire le désastre syrien, faut-il pour autant revenir aux méthodes qui n’ont pas fait leurs preuves en Irak ou en Libye ? Ne faut-il pas développer de nouvelles approches, qui passeront, nécessairement, par des discussions et des accords avec Moscou ?
Si le choix est celui du « moins pire », comme dans beaucoup de démocraties en ce moment, Hillary Clinton l’emporte aisément face à l’improvisation anxiogène de Donald Trump. Pour autant, il n’est pas certain que la candidate démocrate aide à apaiser un monde confronté à une inquiétante montée des périls.
Si le choix est celui du “moins pire”, comme dans beaucoup de démocraties en ce moment, Hillary Clinton l’emporte aisément face à l’improvisation anxiogène de Donald Trump.