L'Obs

NOËL CÉLIS/AFP

-

Jamais je ne me suis senti en reportage aussi près de l’enfer. Voir les détenus de la prison de Quezon entassés sur le terrain de basket et dans les escaliers m’a rappelé une peinture représenta­nt le purgatoire. Pour moi, dormir dans ces conditions s’apparente à de la torture. J’ai pu travailler deux nuits de suite. Avec mon équipe, nous avons d’abord photograph­ié un concours de danse. Mais les détenus et les gardiens nous ont raconté les conditions de détention, et je me suis dit que c’était cette image qui raconterai­t la vérité. Je suis donc revenu vers minuit. Travailler la nuit fut un vrai challenge. Je ne pouvais pas marcher entre les prisonnier­s, il n’y avait pas de place. Au départ, j’étais un peu nerveux, je craignais des incidents, mais les prisonnier­s ont été sympas. Ils m’ont même suggéré des endroits avec un point de vue intéressan­t pour prendre mes clichés ! Je suis monté sur une fenêtre, puis j’ai escaladé pour grimper sur le toit et voir les choses d’en haut. J’ai pensé que cet angle-là me permettrai­t de mieux saisir l’émotion, la tristesse, la pitié que je ressentais. J’étais choqué en fait, je me sentais mal. Beaucoup pensent que les criminels méritent d’être maltraités. Mais ces détenus n’ont même pas été jugés ! Dormir est la seule chose agréable à faire en prison, et eux ne le peuvent même pas. Je me suis dit que le mieux était d’essayer de montrer cette souffrance. J’espère que mes photos seront utiles, forceront des gens à s’emparer de ce problème.

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France