LA RUMEUR DES CRUES
Au tout début du mois de juin dernier, après des pluies exceptionnelles, des crues dévastent la Seine-et-Marne et la hausse périlleuse du niveau de la Seine réveille des craintes : Paris va-t-il être submergé à son tour ? Les télés sont en boucle, les commentateurs s’inquiètent de savoir ce qu’il faut faire pour éviter cette catastrophe annoncée… et les malchanceux qui sont déjà sous l’eau et cherchent, comme n’importe quel individu dans la peine, une explication à leur malheur font le lien. Les inondations qu’ils subissent n’ont rien de naturel, elles sont dues aux manoeuvres qui ont été faites pour « sauver Paris ». Appelés à la rescousse par divers journaux, géologues et ingénieurs hydrauliques tentent d’arrêter la rumeur par des éléments rationnels. Le soupçon n’a aucun fondement ; déplacer une telle masse d’eau est techniquement impossible. Et les spécialistes des légendes urbaines notent que l’accusation est récurrente. Déjà en 2001, lors d’inondations de la Somme, on avait vu se propager le même canard, appuyé alors sur un plan encore plus circonstancié : si on avait « sauvé Paris » en inondant la Somme, c’était pour ne pas gâcher la candidature de Paris aux jeux Olympiques au moment précis où était attendue une délégation du CIO. Cette année, on aurait pu aussi tenter de guérir le mal par le mal en opposant un complotisme à un autre. Alors même que les villages de Seineet-Marne soutenaient mordicus qu’« on » les sacrifiait pour maintenir Paris au sec, Stop Mensonges, une des officines conspirationnistes, affirmait tout de go que Hollande, voulant écraser les grèves contre la loi travail qui paralysaient le pays, était en train d’organiser son inondation.