MISÈRE EN ALLEMAGNE
En 1932, 15% seulement des chômeurs allemands touchaient intégralement l’indemnité de chômage, si maigre fût-elle ; 25% avaient droit à l’aide d’urgence, tandis que 40% étaient tributaires des secours aux pauvres – les 20% restants ne recevaient rien. « Le pays tout entier est dans la détresse, écrivit un observateur qui sillonna certaines régions plongées dans la misère noire, l’intervention o cielle ne sert à rien ; les gens vivent dans un véritable enfer de dénuement, d’oppression et de maladie. » A Berlin et en d’autres villes, durant l’hiver, des milliers de sans-domicile trouvaient chaque jour refuge dans de grandes salles improvisées aménagées pour assurer chaleur, vivres et abri pour la nuit. La situation était désespérante pour des familles entières. « Mon père est au chômage depuis plus de trois ans, écrivit en décembre 1932 une petite Allemande de 14 ans. Nous pensions qu’il finirait par retrouver du boulot un jour, mais même nous, les enfants, avons perdu tout espoir. »
Une étude sociologique du village de Marienthal, à une quarantaine de kilomètres au sud de Vienne, témoigne de l’apathie, de la résignation et du désespoir profond que causait le chômage de longue durée. Les trois quarts de la population sou raient de la fermeture de l’usine textile, seul gros employeur de la localité. « Il ne garde aucun espoir et se contente de vivre au jour le jour, sans savoir pourquoi, lit-on à propos d’un ouvrier au chômage, miséreux, d’environ 35 ans, avec une femme et deux enfants sous-alimentés. La volonté de résister est morte. »