L'Obs

Coucou, revoilà Montebourg !

Même ses proches s’en sont inquiétés : depuis plusieurs semaines, l’ex-ministre était aux abonnés absents. La fin de la primaire à droite et le suspense sur la candidatur­e de Hollande bientôt levé lui dégagent le terrain pour repartir à l’offensive

- Par JULIEN MARTIN

Et Montebourg sortit enfin de son silence. Depuis plusieurs semaines, on ne l’entendait plus. Lui qui avait pourtant lancé sa campagne tambour battant. Dès avant l’été, lors de sa traditionn­elle ascension du mont Beuvray, il déclamait sa vision des choses. François Hollande ? « Je vois un système politique discrédité, incapable de prendre les décisions courageuse­s qui rehaussent, relancent et redressent la France. » L’Union européenne? « Je vois notre chère France chaque jour passer sous la toise des technocrat­es européens, s’aligner et se soumettre à des intérêts internatio­naux qui ne sont pas les nôtres. » Il embrayait à la rentrée, toujours sur ces deux sujets favoris, contre ce président à cause de qui « nous risquons un 21 avril puissance 20 », contre Bruxelles où il faudra « casser de la vaisselle ». Ses critiques, mais aussi ses propositio­ns, commençaie­nt à infuser, comme celle de remplacer le Sénat par une assemblée de citoyens tirés au sort. Et puis, plus rien. Ou presque. Pendant l’examen de la loi de finances, après l’élection de Trump…

Sans mandat, donc sans tribune politique, l’ancien ministre, député, président de conseil départemen­tal, s’est aussi retrouvé sans tribune médiatique. Le comble pour un tribun. Montebourg était enserré dans un triple goulet d’étrangleme­nt. Pris en étau entre une primaire de la droite qui révélait son champion, une primaire de la gauche qui ne connaissai­t pas encore ses participan­ts et un Emmanuel Macron qui captait toute la lumière. Difficile de combattre contre des moulins à vent. D’autant que le Don Quichotte de la politique n’était pas aidé par son propre parti. Le patron du PS, Jean-Christophe Cambadélis, l’affirme depuis longtemps: « Je suis impartial mais je ne suis pas neutre. » Comprendre qu’il ne le soutient pas vraiment. Ce qu’il concède en petit comité : « Si Montebourg est désigné, la moitié des socialiste­s s’en vont chez Macron et le parti explose. » La situation était telle que s’est installée une petite musique sur le thème: «Où est passé Montebourg? »

Plusieurs de ses amis s’en sont inquiétés auprès de lui. Mais ils ont eu la surprise de trouver en retour l’homme plein d’assurance qu’ils connaissen­t depuis toujours. « Tu n’y comprends rien, c’était prévu, ça va passer », a-t-il répondu à l’un d’eux. De fait, prévue ou non, Montebourg a décidé de ne pas subir la période. Mieux, il l’a théorisée. Puisqu’il était invisible, il a arrêté de se montrer. Au lendemain de la victoire de Trump, il a ainsi reporté une interview qu’il devait donner au « Monde » sur la fin de la mondialisa­tion. Trois matinales radio ont subi le même sort. « Ça ne sert à rien de parler en ce moment, on est inaudible », reconnaiss­ait-on dans son entourage. Au lieu de s’exprimer dans les médias, le candidat s’est démultipli­é sur les réseaux sociaux, et sur le terrain. Rien qu’en novembre, il s’est déplacé en Loire-Atlantique, à Lyon, dans la Vienne, à Lille, dans les Yvelines, à Grenoble… Surtout, il n’a pas paniqué parce que les sondages continuaie­nt de le présenter comme le meilleur rempart face à Hollande. Selon une enquête BVA parue à la mi-novembre, il devançait le président avec 52% des intentions de vote au second tour de la primaire, un score inchangé par rapport au mois précédent.

Montebourg a eu raison de garder le sourire. Sans compter que des temps meilleurs se profilent. Enfin, il connaît le candidat de la droite. Enfin, il va découvrir tous ses adversaire­s à gauche. Depuis la fin novembre, il recommence à cogner tous azimuts, dézinguant « les propositio­ns extrêmemen­t dures et brutales » de François Fillon ou invitant tous les Français, quelle que soit leur couleur politique, à « battre le président de la République ». Sur RTL, France 2, « le Monde », il fait à nouveau parler de lui. A coups de propos et de mesures-chocs. Avec un mantra: la vraie gauche, c’est lui ! En témoigne sa propositio­n de baisser les impôts de dix milliards d’euros « pour ceux qui ont des fins de mois difficiles ». Rendez-vous est aussi donné début décembre, lorsqu’il déposera officielle­ment sa candidatur­e à la primaire. Qu’on se le dise, Montebourg est de retour.

IL RECOMMENCE À COGNER TOUS AZIMUTS, DÉZINGUANT “LES PROPOSITIO­NS EXTRÊMEMEN­T DURES ET BRUTALES” DE FILLON.

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