L'Obs

Les petits mondes d’Etel Adnan

ETEL ADNAN. JUSQU’AU 1ER JANVIER, INSTITUT DU MONDE ARABE, PARIS-5E, 01-40-51-38-38 ET WWW.IMARABE.ORG

- B. G.

Une exilée à tout jamais ? Née à Beyrouth en 1925 d’une mère grecque chrétienne et d’un père syrien musulman, Etel Adnan a vécu au Liban, en France et aux Etats-Unis, pays où elle a enseigné la philosophi­e durant une quinzaine d’années. Poète, elle a commencé à peindre à la fin des années 1950, construisa­nt une oeuvre où l’écriture, le dessin, la peinture se côtoient. Le parcours s’ouvre sur la présentati­on du tapuscrit de « l'Apocalypse arabe », un recueil qu’elle publie en 1980 et dont on entend ici, en fond sonore, les vers déclamés en français, en arabe et en anglais. Puis viennent ses « Montagnes ». Comme Hokusai face au mont Fuji ou Cézanne devant la SainteVict­oire, Etel Adnan a trouvé son roc solitaire en Californie, le mont Tamalpaïs. Elle lui a consacré un de ses leporellos (carnet dont les pages se déplient en accordéon, constituan­t une longue fresque), traçant le contour de ses flancs, ses aspérités, ses jaillissem­ents à l’encre noire. Ces volumes se détachent sur des bandes d’aquarelles sur lesquelles elle a retranscri­t des poèmes arabes. Ses tableaux, des années 2010 principale­ment, traduisent le même souci d’un langage minimal : de larges à-plats de couleurs lumineuses – orange, bleu pâle, ocres, verts – figurent des paysages montagneux où brille parfois le cercle incandesce­nt d’un soleil. Des carnets de dessins (tous sous forme de leporellos) viennent rappeler ses séjours à Paris, New York et Beyrouth. Dans la dernière salle, on verra aussi les grandes tapisserie­s aux décors abstraits réalisées en 2015 à partir de ses propres dessins. Au coeur de cette oeuvre, le regard se laisse tout autant happer par ses compositio­ns « architectu­rées » (un peu à la façon de Nicolas de Staël) que par « l’écriture » de ses encres. On devine les yeux d’Etel Adnan. Ils doivent être brillants.

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