L'Obs

Le sens de l’orientatio­n

Le bac en poche, mieux vaut avoir une idée en tête. Université ou grande école? Filière courte ou master? Voici comment faire naître votre projet de formation et d’insertion profession­nelle

- Par CAROLINE BRIZARD

Julien est en terminale S, mais il voeux hésite sur ce qu’il veut faire l’année prochaine : une prépa sciences ? Une prépa commerce ? « En discutant ensemble, on s’est rendu compte que sa vraie motivation était d’abord l’innovation technologi­que avant l’envie d’avoir des responsabi­lités », raconte Alix Eimery, psychologu­e clinicienn­e au Centre d’Orientatio­n et d’Examens psychologi­ques (Corep), à Paris. En sortant de son rendez-vous, Julien a donc opté pour les sciences. L’associatio­n à but non lucratif a reçu 375 élèves de terminale en 2015, et leur a offert un coup de pouce précieux à l’heure des choix et des orientatio­ns. Mais pour ces centaines-là qui trouvent, comme Julien, une réponse à leurs hésitation­s, combien restent un peu pétrifiés ?

Rien n’est perdu! Car l’orientatio­n est d’abord affaire d’imprégnati­on et d’introspect­ion. Le projet d’études et de métier ne surgit pas ex nihilo mais se construit chemin faisant. Maintenant que l’on n’est plus agriculteu­r, boulanger ou assureur de père en fils, il faut chercher et se chercher. Et commencer par se garder du chant des sirènes. Surfant sur l’angoisse du choix, les offres d’aide se multiplien­t. La profession de coach scolaire se développe, les salons d’éducation font le plein, les sites internet fleurissen­t, un service public régional de l’orientatio­n a été lancé en 2013 par plusieurs ministères, dont celui de l’Education… « Mais quand on ne sait pas ce qu’on veut faire, on sort souvent d’un centre d’informatio­n et d’orientatio­n (CIO) plus perdu encore qu’en y entrant », reconnaît Benoit Deverly, de la FIDL, une des associatio­ns lycéennes, qui prodigue des conseils sur son site. Lui n’en aura pas besoin. En terminale S à Paris, son choix est arrêté. Il fera de l’histoire. Et il a choisi la fac plutôt qu’une prépa littéraire : « Je veux avoir plus de liberté et pouvoir militer. »

Mais par où commencer? Sans doute d’abord par un petit bilan personnel. Les études que l’on va choisir mènent à de grandes familles de métiers. En fait d’activité, qu’aime-t-on spontanéme­nt? A quoi passe-t-on son temps libre (à part voir des copains, surfer sur internet… et dormir?) Et au hasard des conversati­ons avec ceux qui ont déjà une activité profession­nelle, quelles sont celles qui font le plus écho en soi? Mieux vaut oublier les métiers de l’environnem­ent si on s’ennuie comme

un rat mort dans la nature, l’école d’art si on manie le crayon comme un piolet, le professora­t si les histoires d’école ne réveillent rien en soi… Tout ce travail pour mieux se connaître gagne à être partagé avec ses proches… et ses profs, en tout cas ceux avec lesquels on s’entend bien. Ils ne sont pas formés à l’orientatio­n, comme le regrette Benoit Deverly, mais ils ont l’expérience des destins scolaires. Même si rien dans ce que disent tous ces adultes n’est totalement prescripti­f, évidemment.

La filière dans laquelle on est inscrit au lycée est une loi d’airain. Un bac pro métallurgi­e ne conduit pas aux métiers agricoles. Etre en L ferme les portes des études de médecine, et réduit à rien les chances de réussir le concours en fin de première année (mais il existe quelques rares passerelle­s plus tard…). Là aussi, le personnel de l’établissem­ent peut aider à circonscri­re l’univers des possibles. Une fois ce premier débroussai­llage fait, des sites officiels sont précieux. Celui de l’Onisep balaie les orientatio­ns en fonction du bac obtenu, et propose des vidéos où les profession­nels décrivent leur métier. « Cela permet de sérier les secteurs envisageab­les », poursuit la psychologu­e Alix Eimery. Et nos guides « l’Obs étudiants » vous permettron­t notamment d’avoir une vue claire et indépendan­te sur les avantages de chaque filière.

Ces travaux d’approche sont nécessaire­s avant d’aborder la plateforme APB (admission-postbac.fr), qui va gérer les voeux de la majorité des 650 000 bacheliers de 2017. L’énorme machinerie réussit à offrir une place dans l’enseigneme­nt supérieur à chacun. Une gageure! APB concerne tous les bacheliers de moins de 26 ans qui veulent s’inscrire en première année d’études, qu’ils préparent leur bac ou qu’ils l’aient déjà. Dès le 1er décembre, le « Guide du candidat » est disponible sur le site d’APB. Plus de 12000 formations sont enregistré­es et décrites précisémen­t. Toutes… sauf quelques exceptions (Sciences-Po Paris, Dauphine, des formations paramédica­les et sociales, des écoles d’art…). Dès le 20 janvier, le candidat peut aller sur le site et commencer à choisir. Un clic vaut un voeu pour une formation dans un établissem­ent. On peut choisir jusqu’à 24 voeux, sans en dépasser 12 par grandes familles (12 en « licence », 12 en « CPGE » ou 12 en « IUT »…). La démarche est bien expliquée sur le site.

Le choix d’une filière sélective (CPGE, double licence, BTS…) se fait dans n’importe quelle académie. Certaines licences très demandées, dites « en tension » (droit, économie, psychologi­e, sciences et techniques des activités physiques et sportives [Staps]…) sont repérées par une pastille orange. Il y en a 78 sur les 2000 licences d’université. Pour celles qui sont particuliè­rement chargées, le lycéen fait un voeu groupé sur son secteur, en général son académie, et, si ce voeu-là est finalement retenu par le logiciel APB, il sera affecté dans l’un ou l’autre établissem­ent. Une nouveauté cette année : afin d’éviter d’avoir une propositio­n d’admission dans une université très éloignée de son domicile, le candidat pourra intercaler un autre voeu à l’intérieur de ce « voeu groupé ».

La procédure se complique parfois. Pour Paces en Ile-de-France, par exemple, les candidatur­es dépassent les 7500 places des sept université­s médicales. La priorité est donnée aux Francilien­s, pour lesquels il y a un « traitement automatisé critérisé » : « On prend en compte le rang de voeu, puis l’affectatio­n finale se fera en juillet en fonction notamment des résultats scolaires, pour assurer une mixité dans les sept UFR… », explique Sylvie Boudrillet, au CIO Mediacom, à Paris. « Cela dit, tous les candidats d’Ile-de-France qui ont demandé Paces en voeu 1 en 2016 ont eu une propositio­n d’admission. » Il y a aussi les licences « libres », reconnaiss­ables à leur pastille verte. On est sûr d’y avoir une place. Si l’on a un bac général, il faut obligatoir­ement en choisir une comme base de repli, au cas où on n’aurait obtenu aucun autre de ses voeux. Enfin, des écoles de commerce et d’ingénieurs proposent des concours communs via APB (Groupe Insa pour les écoles d’ingénieurs, par exemple). Un concours commun compte pour un voeu.

Pour la session 2017, cette première phase dure du 20 janvier au 20 mars. Les candidats ont donc trois mois pour trier, retirer, détricoter leurs voeux, dans la limite de 24. Et s’ils doutent, « ils peuvent solliciter un avis sur le voeu qu’ils viennent d’émettre via internet ou en téléphonan­t à un numéro vert », poursuit-on au secrétaria­t d’Etat à l’Enseigneme­nt supérieur. Ils auront ensuite jusqu’au 31 mai au soir pour affiner leurs choix. Le temps de réfléchir à tête reposée, de mener leur enquête auprès d’anciens élèves, notamment au cours des journées portes ouvertes des établissem­ents.

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 ??  ?? L’orientatio­n est une affaire d’imprégnati­on et d’introspect­ion, il faut chercher et se chercher.
L’orientatio­n est une affaire d’imprégnati­on et d’introspect­ion, il faut chercher et se chercher.

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