Machines à jobs
Les jeunes diplômés sont accueillis à bras ouverts dans de nombreux secteurs comme l’industrie ou les services
S’il est bien un sujet qui n’inquiète pas les jeunes diplômés d’écoles d’ingénieurs c’est la recherche d’emploi… Grâce à un marché hyperactif dans l’industrie et, surtout, les services, en particulier l’informatique et le numérique, ils appartiennent à la caté- gorie des « extrêmement sollicités » par les recruteurs. « 82 % des jeunes ingénieurs diplômés sont en poste après la fin de leurs études et 60 % signent un CDI avant même la fin de leur scolarité », a ainsi mesuré la Conférence des Grandes Ecoles (CGE) dans sa dernière enquête. Pour Francis Jouanjean, le délégué général de cette association, « à ce stade, on parle de plein emploi ! ».
Johan, diplômé de Centrale Nantes, en est la parfaite illustration « L’entreprise où je faisais mon stage voulait m’engager, mais, via le réseau des anciens de mon école, j’ai reçu une proposition plus intéressante d’un cabinet de conseil en stratégie. » Idem pour Jessica, diplômée de l’ESME Sudria, une école de mécanique, aspirée par le marché en moins d’un mois : « J’ai refusé plusieurs offres, car je ne voulais pas prendre un poste en dessous de 35 000 euros par an. » Voilà donc une autre bonne nouvelle : même sans viser le top des écoles… Polytechnique, les Mines ParisTech, il est possible de tracer de bien belles carrières grâce aux écoles d’ingénieurs.
Nouvelle d’autant plus réjouissante que ces établissements, autrefois chasse gardée des purs matheux issus de classes préparatoires, accueillent désormais volontiers des profils plus variés.
LA PRÉPA N’EST PLUS LA SEULE VOIE
Faut-il passer par la classe prépa pour entrer en école d’ingénieurs ? La question taraude parfois les lycéens très bons élèves poussés par leur entourage mais pas forcément tentés par deux années d’intense bachotage. A la sortie, moins de 40 % choisiraient finalement la classe préparatoire, selon la CGE. En réalité, si les classes préparatoires restent encore la voie royale pour se faufiler dans des institutions telles que Polytechnique, Les Mines ou Centrale Paris, elles ne sont plus une absolue nécessité pour devenir ingénieur. Les écoles ouvrent en effet désormais leurs portes aux diplômés de BTS, de DUT et de licences par le jeu des concours en admissions parallèles. Les Arts et Métiers par exemple, qui diplôment 1100 ingénieurs par an, comptent 10 % de BTS et DUT dans leurs rangs. L’école se dit séduite par ces étudiants au profil pragmatique qui enrichissent considérablement les promotions. Même chose à Centrale Lyon, qui réserve un quart de ses places aux étudiants hors prépa.
CES ÉCOLES QUI RECRUTENT APRÈS LE BAC
Enfin, ces dernières années, certaines écoles post-bac ont largement rebattu les cartes dans l’échiquier des écoles d’ingénieurs. Si les prestigieux établissements de rang 1 gardent leur avance, plusieurs
écoles en cinq ans se sont taillé une solide réputation auprès des recruteurs. « Ce n’est plus un critère aussi important pour les recruteurs », assure Julien Weyrich, directeur de la division ingénieur pour le cabinet de recrutement Page Personnel. Il cite pêle-mêle plusieurs établissements très prisés : « Les Insa, les UTC, l’Epita, l’ESME Sudria ou encore l’Esigelec. »
Les Insa et les UTC, très cotés dans le secteur de l’industrie, garantissent des scolarités tournées vers l’international et diplôment chaque année de gros bataillons d’ingénieurs. Revers de la médaille, il faut montrer patte blanche pour y entrer, avec un niveau qui n’a rien à envier aux classes préparatoires « cette année, 80% des entrants en première année de l’Insa Lyon avaient décroché un bac S avec une moyenne de 17,5 », décrit Eric Maurin, son directeur.
D’autres établissements font figure de référence dans leur spécialité. C’est le cas de l’Estaca (école du Groupe ISAE), dans les transports et l’aéronautique, l’Epita, régulièrement citée par les recruteurs de l’informatique et du numérique, ou encore de l’Esigelec pour sa filière automatisme.
DES PROGRAMMES À LA CARTE
Les enseignements et les parcours proposés aujourd’hui dans les écoles d’ingénieurs sont riches et variés. A l’image des écoles de commerce, la scolarité se construit désormais à la carte, avec une large palette d’options qu’il convient d’explorer à la loupe, car elles peuvent donner une sacrée valeur ajoutée au diplôme. Illustration à l’Ensimag, à Grenoble, où année césure, parcours à la carte et long séjour à l’étranger sont au programme. Centrale Nantes offre la possibilité de suivre un double cursus (ingénieur-architecte ou ingénieur-manager).
Les autres établissements ne sont pas en reste, l’Efrei par exemple, école spécialisée en informatique qui recrute dès le bac, propose une filière internationale qui permet aux étudiants de passer entre dix et quinze mois d’immersion à l’étranger tout au long du cursus sous forme de stages ou d’échanges avec des universités. L’Esigelec a choisi quant à elle de privilégier l’apprentissage et un tiers de la promotion suit aujourd’hui cette voie. D’autres encore ont mis l’accent sur des relations étroites avec le monde professionnel. C’est le cas de l’Estaca, où une majorité des enseignements est assurée par des ingénieurs en activité chez les grands donneurs d’ordre du secteur.
RECHERCHE ET INCUBATEURS
Enfin, dans ces établissements où l’innovation est au coeur des enseignements, les étudiants sont de plus en plus tentés par la création d’entreprise. Les écoles se sont donc mises au diapason, avec l’ouverture d’incubateurs maison. C’est le cas à Centrale Lyon, qui propose des espaces d’incubation dans ses murs et envoie ses étudiants passer trois mois dans Silicon Valley. « Nous comptons ouvrir des incubateurs au Japon, en Allemagne, en Australie et en Allemagne », explique Frank Debouck le directeur de l’établissement. A l’ECE aussi, l’entrepreneuriat est encouragé et choisi par de nombreux étudiants, comme Antoine : « La proximité avec le monde de l’entreprise m’a convaincu de monter ma boîte et j’ai été accompagné pour cela dès mon projet de fin d’études », raconte ce créateur de start-up.
Plus classique, mais très efficace : la filière recherche est une option privilégiée entre autres par Centrale Lyon et les Mines de Paris. Ces deux écoles affichent des taux élevés de poursuite en thèse, grâce à la présence de laboratoires très innovants au sein de leurs campus. Une particularité qui garantit aux jeunes ingénieurs-docteurs des démarrages de carrière en trombe. Si les jeunes ingénieurs ont globalement la cote auprès des recruteurs, ceux qui se sont spécialisés dans certains domaines se voient carrément dérouler le tapis rouge. « Les jeunes informaticiens n’ont que l’embarras du choix en ce moment et ils ne se privent pas de faire la fine bouche », constate Julien Weyrich, de Page Personnel. De même, ceux qui acceptent de se tourner vers l’industrie, en particulier l’aéronautique et l’automobile, sont accueillis à bras ouverts, avec un marché très tendu pour les spécialistes d’automatisme, de robotique, de systèmes embarqués.