CRISE DE FOI POLITIQUE
Ils y étaient tous. Le 15 août dernier, alors que s’engage la primaire à droite, les principaux candidats vont à la messe… et le font savoir ! En vacances au Cap Nègre, Nicolas Sarkozy débarque par surprise dans une petite église du Lavandou, proche de son lieu de villégiature. François Fillon célèbre l’Assomption à l’abbaye de Solesmes, dans son fief sarthois, et prêche sur Twitter : « Retrouver nos racines chrétiennes et l’esprit des Béatitudes. » Alain Juppé, lui, assiste à la messe en plein air à Lourdes. Comment expliquer cette soudaine crise de foi dans la classe politique ? Trois semaines après l’attentat contre le père Hamel à Saint-Etienne-du-Rouvray, les uns et les autres entendent marquer leur solidarité avec la France catholique. Mais non sans arrière-pensée : les manifs anti-mariage gay de 2012-2013 ont montré que la France des paroisses était capable de se mobiliser. Et impossible dans le débat sur les « valeurs » si prégnant dans la primaire de ne pas citer les « racines chrétiennes de la France ». Dans la France laïque, il est donc presque devenu tendance pour un responsable politique d’afficher sa foi. Une partie de la droite est décomplexée : « Je suis chrétien », clame Nicolas Sarkozy lors de son discours à Saint-André-lez-Lille en juin dernier. L’ancien président était déjà, on s’en souvient, l’auteur du célèbre discours du Latran dans lequel il expliquait que le curé était supérieur à l’instituteur dans la transmission des valeurs. Son ami Christian Estrosi s’extasie, lui, sur Twitter devant la « magnifique crèche » de l’église Sainte-Rita, patronne des Niçois, et se prend en photo priant à la messe de Noël. Tandis que pendant les débats de la primaire, Fillon et Juppé revendiquent chacun leur proximité de pensée avec le pape François. Au FN, Marion Maréchal-Le Pen, habituée du pèlerinage de Chartres à la Pentecôte, brandit sa foi à chaque interview. La gauche ? Elle n’a pas été autant touchée par la grâce. Mais Emmanuel Macron, qui n’a pas craint de s’afficher avec le très catholique Philippe de Villiers au Puy-du-Fou, a fait part de ses réflexions à « Marianne » : « Dans sa conscience profonde, je pense qu'un catholique pratiquant peut considérer que les lois de la religion dépassent les lois de la République. Simplement, à chaque instant où il est dans le champ public, les lois de la République prévalent sur les lois religieuses. » Maël Thierry