L'Obs

Brève rencontre Copé : « Monsieur 0,3% » vous salue bien !

Arrivé dernier de la primaire de la droite, devancé même dans sa ville de Meaux par Fillon et Juppé, Copé affiche une résistance à toute épreuve. Son remède contre le spleen: l’humour

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I l devrait être à terre. Déprimé. Humilié par son 0,3% à la primaire de la droite. Condamné aux Enfers après la victoire de ce François Fillon qui, il n’y a pas si longtemps, le traitait quasiment de mafieux devant les caméras quand l’un et l’autre se disputaien­t la présidence de l’UMP. Lorsqu’il débarque dans une brasserie du 15e arrondisse­ment, dix jours après la pire soirée électorale de sa vie, Jean-François Copé affiche pourtant le sourire.

Comme s’il avait déjà digéré ses 12 787 petites voix sur les 4 millions de votants, à peine plus que les votes blancs! Comme s’il avait déjà tourné la page. Dès le mardi suivant le triomphe de Fillon, il donnait le change à l’Assemblée. Devant ses collègues députés, il proposait ses services pour le pot organisé en l’honneur du vainqueur : « Si vous cherchez un pianiste pas cher… » Eclat de rire général. Même Laurent Ruquier, à la télé, a salué sa sportivité. « Dans ma famille, on m’a toujours appris que l’humour était une bonne thérapie », explique Copé, avant de faire mine de s’interroger : « J’ai peut-être une carrière à faire dans le comique troupier ? »

Mais que ses nombreux contempteu­rs ne se réjouissen­t pas trop vite: il ne songe nullement à se reconverti­r, ni dans le one-man-show, ni dans la musique, aussi doué soit-il pour le clavier. Même très amoché, celui qui se compare à Zorro tente déjà de remonter sur ce cheval qui, depuis des années, prend un malin plaisir à le désarçonne­r.

Il a déjà refait le film. Sans se remettre en cause. D’autres que lui auraient vu dans ce score le signe d’un rejet personnel. Pas lui. Certes, il n’était pas vraiment « au Carnaval » ce soir-là, mais ce n’était rien à côté de son éviction de la tête de l’UMP en 2014 après l’affaire Bygmalion. « Pour moi, la vraie épreuve, c’était il y a deux ans et demi. » Même avec 0,3%, il bouge encore et se trouve des excuses : on lui a mis tellement de « bâtons dans les roues » ! Lui, il n’a eu droit ni à une grande émission, seul en prime time, sur France 2 (« ça change tout »), ni aux unes de magazines dont a bénéficié un Bruno Le Maire qui n’a obtenu que 2,4%. « Je suis triste de mon résultat, mais qui, en dehors de Fillon, est content de son score ? », lâche-t-il. Une vraie satisfacti­on tout de même : l’éliminatio­n de Sarkozy. « Les gens avaient cet objectif premier », dit-il. Comme lui, qui n’a cessé de le torpiller ?

Copé voit même quelques avantages à cette aventure : avoir participé à la primaire « m’a permis de rester propriétai­re de mes idées » ; « de dire aux Français que j’étais innocent » et « d’être à la table des discussion­s ». Surtout, il n’y voit qu’une nouvelle haie sur son chemin vers… l’Elysée ! « Ce score est un test supplément­aire de solidité que les Français m’imposent. C’est une manière pour eux de me dire : puisque tu veux vraiment diriger le pays, prouve-nous que tu es vraiment solide. » Lui, président, est-ce toujours d’actualité? « C’est le sens que j’ai donné à ma vie. Mais l’homme propose, les événements disposent. »

Dans l’intervalle, passera-t-il tout son temps au purgatoire ? Des proches de Fillon ont menacé de ne pas lui donner l’investitur­e pour les législativ­es à Meaux, « sa » ville où il est pourtant arrivé troisième, derrière Fillon et Juppé. Il ne s’en inquiète pas. Il a eu le nouvel homme fort de la droite au téléphone, a déjà hérité d’un strapontin au parti –une place au comité politique – et doit rencontrer le vainqueur de la primaire pour leur premier tête-à-tête depuis 2014. Autant de signaux encouragea­nts. Copé va même jusqu’à se trouver des points communs avec son rival d’hier! « Lui et moi, on a quand même été largement lâchés par nos propres amis. » Pour la suite, parie-t-il, Fillon aura besoin de gens solides. Comme lui, évidemment. Pourquoi pas dans un gouverneme­nt? Si l’humour guérit, il est aussi bien connu que l’espoir fait vivre.

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