Elles cassent la barrique!
Dans le monde de Bacchus, elles étaient minoritaires mais les choses changent. Sommelières cavistes, propriétaires de bars à vins… Une nouvelle génération de filles déringardise la profession. Affranchies et sans chichis, six d’entre elles nous font parta
1 TO XUÂN CUNY Propriétaire du bar à vins et à manger Aux Deux Cygnes, 36, rue Keller, Paris-11e
To Xuân Cuny, 28 ans, reçoit dans son bar à vins et à manger vêtue d’un look décontracté. Un parcours sans faute: célèbre école hôtelière de Lausanne, stages au Crillon, puis à Copenhague, chez Relae de Christian Puglisi, l’un des meilleurs bistrots du monde. Il y a deux ans, elle a ouvert Aux Deux Cygnes, son propre bar à vins où elle propose de goûteuses assiettes à partager (entre 6 et 10 €), assorties à une soixantaine de cuvées de vignerons avec qui elle travaille directement. « Le côté abordable, moins élitiste me plaît dans le vin nature. J’ai toujours voulu qu’il y ait un rapport qualité/ prix très visible. » Pari gagné.
Son dernier vin coup de coeur : Un pinot noir 2015, par Jean Ginglinger à Pfaffenheim (Alsace). « Léger, digeste et avec une sacrée minéralité, sans sulfites, une bombe ! »
La bonne association : Une bonite crue de Saint-Jean-de-Luz, betteraves, crème crue et vinaigrette sésame, accompagnée de la cuvée Chenin blanc Pacotille 2013 du Domaine Deboutbertin à Faye-d’Anjou.
2 MARINE DELAPORTE Sommelière chez yam’Tcha, 1 étoile au Michelin, 121, rue Saint-Honoré, Paris-1er
Silhouette frêle, chignon serré et tailleur cintré impeccable: « La façon de s’affirmer dans une salle de restaurant change tout », annonce Marine, 25 ans. Cette Bretonne d’origine, diplômée de l’école hôtelière de Dinard, passée par le George-V et Ze Kitchen Gallery, à Paris, est aujourd’hui chargée de la cave du yam’Tcha, la table étoilée aux accents franco-asiatiques tenue par la chef Adeline Grattard. « Adeline m’a fait confiance, j’ai eu carte blanche. Comme le menu n’est jamais fixé à l’avance, je peux imposer ma créativité et mon style. »
Son dernier vin coup de coeur : Billes de Grenache 2015, domaine de la Barthassade. « Des fruits rouges frais, un vin vif et épicé. »
La bonne association : Des langoustines et saint-jacques, épinards, citron caviar, sauce agrumes servies avec un riesling Kabinett 2014 du Domaine Fritz Haag, en Moselle allemande.
3 JUSTINE BAISSAC Sommelière à l’Epicure, table 3 étoiles du Bristol, 112, rue du Faubourg-Saint-Honoré, Paris-8e
A 25 ans, Justine a intégré depuis peu la brigade de l’Epicure, le 3-étoiles Michelin du Bristol à Paris. Dans ce palace, pas toujours facile de s’imposer en tant que femme auprès des clients. Pourtant, l’expérience est là : au Saint-Martin du Château Saint-Martin & Spa (2 étoiles), en Provence, à l’Hôtel Royal Evian ainsi que chez Michael Wignall au Latymer (2 étoiles aussi) à Bagshot, en Angleterre. Chez Epicure, elle peaufine ses gammes aux côtés de Bernard Neveu, le chef sommelier qui règne sur 90000 bouteilles et près de 2 000 références. Son dernier vin coup de coeur : Le rouge Barbaresco Vanotu, du Domaine Pelissero 2007.
La bonne association : Des poireaux d’Ile-de-France cuits entiers au gril, beurre aux algues, tartare d’huîtres, cébette et citron, accompagnés d’un riesling (blanc) grand cru Sommerberg 2014, par Albert Boxler.
4 LAURA VIDAL Sommelière itinérante pour The Paris Pop-Up Restaurant et copropriétaire du restaurant Chardon, 37, rue des Arènes, Arles
Qui aurait cru que cette fringante Québécoise, spécialisée dans la finance, lâcherait tout pour recommencer à zéro en tant que serveuse au restaurant Club Chasse et Pêche, à Montréal? Depuis, Laura Vidal a fait du chemin. Passée chez Frenchie, temple de la bistronomie parisienne où elle développera toute la carte des vins, elle y rencontre aussi son compagnon, le chef Harry Cummings, avec qui elle lance le concept de restaurant éphémère « Paris Pop-Up », investissant des lieux à Londres, New York, Kyoto, Oakland… Aujourd’hui fixé à Arles avec son restau associatif Chardon, le couple accueille des chefs et bartenders du monde entier. Leur mot d’ordre : « Des vins nature, orange, des blancs de noirs, des choses un peu étranges, mais toujours intéressants pour les accords. » Son dernier vin coup de coeur : Un côtes-du-rhône Esprit libre 2015, par Nicolas Renaud, Clos des Grillons. « Equilibre, finesse, gourmandise par une future étoile, près d’Avignon. » La bonne association : Un poiré d’Eric Bordelet avec un baba à la poire Williams, poire pochée et zeste de citron.
5 CAMILLE FOURMONT Propriétaire de la Buvette 67, rue Saint-Maur, Paris-11e
« Ne dites surtout pas que je suis sommelière, je ne me considère pas du tout comme ça. » Les étiquettes, ce n’est pas vraiment le truc de Camille Fourmont. Dans sa cave à manger avec mosaïques et zinc années 1930, elle reçoit en taulière pop moderne les clients venus siroter un verre de vin nature assorti d’une démente burratina fumée des Pouilles ou de succulents petits maquereaux et fleurs séchées. Rien ne prédestinait cette diplômée des Langues orientales, qui a même étudié une année à Damas, en Syrie, à parler vin et bons produits. Question de hasard et d’opportunités. D’abord au Café noir, dans le 20e à Paris, puis au Mama Shelter, avant de rejoindre la fine équipe d’Iñaki Aizpitarte au Chateaubriand et au Dauphin. Mais c’est surtout Danièle Gérault, marchande de vins très réputée, qui lui apprend « à déguster sans dogmatisme ». Son dernier vin coup de coeur : Le lucky You, de Laurent Saillard (Loire). « Un sauvignon super-bien équilibré qui réconcilie avec le sauvignon ! » La bonne association : « Un dessert au moka et au géranium, accompagné d’un petit verre de fino. »
6 SOLENNE JOUAN Sommelière du 6 Paul Bert, 6, rue Paul-Bert, Paris-11e
Après avoir travaillé dans la communication pour de grandes marques de luxe, Solenne Jouan a tout laissé tomber pour travailler au Baratin, à Paris, restau qu’elle fréquentait alors assidûment. Elle y a découvert le monde du vin et s’est formée sur le tas, écoutant les vignerons, squattant les dégustations, dévorant les livres. Ultra-investie, elle ne tarde pas à trouver une place dans d’autres bistrots tendance de la capitale comme Saturne ou Vivant. A la tête aujourd’hui de la cave du très couru 6 Paul Bert, elle twiste avec brio vins nature et grands crus. Son dernier vin coup de coeur : Un chardonnay Croix Sarrant Savagnin 2014, du Domaine Les Dolomies, dans le Jura. La bonne association : Huîtres, fruits de mer et crudités avec Les Nourrissons de Bernaudeau Chenin, dans la Loire.