Les lundis de Delfeil de Ton
Où l’on voit que ça peut être des menteries
Il se prenait pour un grand scientifique, il n’était qu’un parfait criminel. En 1945, le docteur Josef Mengele échappa à la justice, s’enfuit en Amérique du Sud où il prit un autre nom et n’eut plus l’occasion de renouveler ses expérimentations prétendument médicales, ni d’approfondir ses recherches génétiques si monstrueuses qu’elles lui avaient valu, à Auschwitz où il y avait de la concurrence, le sobriquet d’« Ange de la mort ». Pendant un quart de siècle, ce salaud célèbre survécut librement. Il mourut au cours de l’été austral 1979, à l’occasion d’une baignade en mer. Son cadavre fut authentifié quelques années plus tard grâce à des avancées génétiques auxquelles il n’avait en rien contribué et il reposait, comme il arrive, dans les archives de l’institut médico-légal où on l’avait transporté après exhumation, en l’occurrence celui de Sao Paulo. C’est là qu’un professeur de médecine, à la recherche d’un squelette pour son enseignement, vient de l’aller chercher, donnant son nom pour l’édification de ses étudiants, contrairement à la coutume qui requiert l’anonymat, et c’est ainsi que le docteur Mengele sert enfin à quelque chose d’utile, comme quoi il ne faut jamais désespérer de personne.
Il n’est pas besoin de pousser beaucoup certains défenseurs de la cause animale pour les entendre assimiler aux camps d’extermination nazis les abattoirs où sont mis à mort les animaux de boucherie. Leur émotion fait qu’on leur pardonne. Une proposition de loi a été votée en première lecture par l’Assemblée, reportée à la prochaine législature pour son passage devant le Sénat, qui exigera l’installation de caméras pour filmer en permanence le parcours des animaux dans les abattoirs et mettre fin à des agissements scandaleux révélés récemment par des enregistrements clandestins. De fil en aiguille, en arrivera-t-on à l’interdiction de la nourriture carnée? C’est le but non dissimulé des militants les plus motivés. Les fumeurs de tabac en sont à devoir acheter, fort cher, des cigarettes dont l’empaquetage est destiné à les en dégoûter. Les clients des boucheries peuvent déjà imaginer le jour où les films tournés dans les abattoirs seront di usés sur écran géant, au-dessus de la caisse, là où trône généralement l’épouse du boucher, la femme du monstre.
Ne parlez pas d’un bon steak tartare à Nancy Holten. Née aux Pays-Bas, grandie en Suisse et y vivant avec ses trois enfants de nationalité suisse, cette femme de 42 ans souhaite voter en Argovie, où elle habite. Pour cela, il lui faut l’accord des habitants de sa commune, lesquels pour la deuxième fois, par 200 voix sur 260, viennent de rejeter sa demande de naturalisation. C’est qu’elle est végane, Nancy Holten, c’est son droit de n’aimer pas la viande qu’elle a laissée tomber en même temps qu’elle se séparait de son mari, mais elle le proclame haut et fort en toute occasion, dans un village où on est fier de son cheptel, ce qui agace, et en plus son souci des ruminants la fait militer pour l’interdiction des cloches des vaches, au motif que le tintement nuirait à leur bien-être. Elle arrive du plat pays et elle veut nous apprendre ce qui est le meilleur pour les vaches de nos collines ! Qu’elle y aille, dans le plat pays, si elle veut voter. Et ding. Et dong.
Il habitait avec sa mère. Elle est morte, sa mère. Il a caché le corps de sa mère dans sa voiture. Il a trouvé un endroit pour sa mère. Il l’a emmurée dans un vide sanitaire, sa mère. Ils ont fait des travaux dans son immeuble, à sa mère. Ils l’ont sortie six ans après, sa mère. C’est bien votre mère ? Je l’ai tuée, ma mère, puis je savais pas quoi en faire. Vous touchez ses aides sociales, vous n’avez pas déclaré le décès de votre mère. On aurait découvert ce que j’y avais fait, à ma mère. Fils de Marseille et de sa mère.
L’épouse du boucher, la femme du monstre.