L'Obs

80ANS DE COUPS TORDUS

Les affaires croustilla­ntes d’espionnage entre Russes et Américains sont légion. Certaines remontent à avant la guerre froide. Tour d’horizon des plus célèbres

- Par VINCENT JAUVERT

LES ROOSEVELT, CIBLES DES ESPIONS DE STALINE

Avant la guerre, l’administra­tion américaine était infiltrée par plusieurs agents de Moscou, et ce jusqu’à la Maison-Blanche. L’étendue de cette pénétratio­n a été récemment mise au jour par la publicatio­n de télégramme­s entre le siège du NKVD (l’ancêtre du KGB) à Moscou et ses envoyés à Washington – télégramme­s secrets que les services américains avaient réussi à décoder.

Le président des Etats-Unis, Franklin Roosevelt, et son épouse, Eleanor, étaient la cible prioritair­e des espions de Staline. Dans leurs échanges clandestin­s, les agents russes les surnommaie­nt « Kapitan » et « Kapitansha ». Pour tenter d’approcher le couple, le chef des espions soviétique­s aux Etats-Unis, le « résident », faisait confiance au patron du Parti communiste américain, Earl Browder. Ce dernier avait pour mission de recruter des informateu­rs parmi les hauts fonctionna­ires sympathisa­nts du Parti. Par son intermédia­ire, plusieurs responsabl­es du Départemen­t d’Etat et du Trésor ont fourni au NKVD de nombreux télégramme­s diplomatiq­ues importants et des informatio­ns confidenti­elles sur les décisions de Roosevelt et de son équipe.

Ce Browder était l’homme à tout faire des espions de Staline en Amérique. Il leur servait de grand argentier. Il puisait dans la caisse du Parti pour financer des opérations du NKVD à Washington. C’est ainsi qu’a été montée World Tourist, une fausse agence de tourisme. Cette officine servait à faire entrer des agents soviétique­s sur le territoire des Etats-Unis. Mais, malgré les efforts de Browder et de son réseau, le NKVD n’est jamais parvenu à monter le « coup » dont il rêvait : recruter la First Lady. Il espérait profiter des liens étroits entre la très active Eleanor et les milieux les plus à gauche. Peine perdue : la première dame était une grande patriote. En revanche, grâce au maillage clandestin qu’ils ont tissé dans l’intelligen­tsia américaine, les espions soviétique­s sont parvenus, après la guerre, à mettre la main sur le secret de la bombe atomique.

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