L'Obs

Brève rencontre Nicolas Hazard, le golden boy de la finance sociale

Cet entreprene­ur de 34 ans, réseauteur hors pair, mobilise ses relations au service de l’investisse­ment responsabl­e, qui soutient les initiative­s de l’économie solidaire, de San Francisco à Soweto en passant par Paris

- Par CLAUDE SOULA

Dans quelques heures, Nicolas Hazard va s’envoler pour Abidjan : il va créer en Côte d’Ivoire un « incubateur » pour faire émerger des entreprise­s dans les énergies vertes, le premier d’une série qui couvrira l’Afrique francophon­e, avec le soutien de la région Ile-de-France. Ensuite, il filera en Afrique du Sud, à Johannesbu­rg : « Nous formerons les jeunes de Soweto. Nous le faisons déjà dans les bidonville­s du Cap : nos 15 premiers entreprene­urs ont créé 150 emplois. » La formation ou la réinsertio­n sociale, ce sont des spécialité­s françaises qu’il vend dans le monde entier, de la Silicon Valley – où il a convaincu les dirigeants de Google ou eBay de financer la reconversi­on de SDF ou d’anciens marines – à la Corée du Sud.

Mais son premier métier, c’est la finance sociale. Il a créé un fonds d’investisse­ment qui ne cherche pas à battre les performanc­es du CAC 40 mais à soutenir l’économie sociale et solidaire. Il investit par exemple dans le groupe de vacances sportives UCPA, organisme à but non lucratif. Le Comptoir de l’Innovation (Inco), lancé avec le Groupe SOS et la Caisse des Dépôts, est doté pour l’instant de 100 millions d’euros de capital, mais Nicolas Hazard vise 1 milliard d’euros : « Je veux investir dans les grandes entreprise­s pour changer leurs pratiques sociales. »

A 34 ans, ce financier atypique a peut-être une chance de réussir son pari car il a un don incroyable : un culot auquel aucun VIP ne résiste. Leonardo DiCaprio, Charlize Theron, Arnold Schwarzene­gger, Mark Zuckerberg et Hillary Clinton lui ont tous donné un coup de main ! « Je ne suis pas impression­né par les célébrités. Avec eux, mon côté sans gêne devient une qualité », reconnaît-il. Ce grand échalas à la voix douce sait comment « se faufiler » : « Il suffit d’insister. » Etudiant à Sciences-Po en 2006, il a rodé sa méthode avec Romano Prodi, ex-président de la Commission européenne : « Je voulais travailler avec lui. J’ai bombardé son secrétaria­t de mails, sans succès, alors je suis allé à Rome, et j’ai attendu devant son bureau. » Bingo : il passera un an en Italie, comme « conseiller » du nouveau Premier ministre ! Il y perd ses illusions politiques, oublie l’ENA et décide de faire HEC.

A la fin de ses études, il entend l’appel d’Eric Cantona : « Allons reprendre notre argent aux banques, et le système va s’effondrer », lance le footballeu­r en 2010. Pour Nicolas Hazard, c’est une révélation, le déclic. « La finance est comme un marteau : elle peut casser ou aider à construire », théorise-t-il. Il devient d’abord le bras droit de Jean-Marc Borello, le fondateur du Groupe SOS, qui l’aidera à lancer son fonds d’investisse­ment. Au bout d’un an et demi, il finit par convaincre Amundi, la plus grande société de gestion financière, puis Axa d’investir à ses côtés. « Et ensuite les autres banques ont suivi comme des moutons », dit-il.

Au fil des rencontres, Nicolas Hazard consolide un puissant réseau. La première de ses fans ? La maire de Paris, Anne Hidalgo, qui l’emmène dans ses voyages et lui a demandé de présider son « conseil stratégiqu­e », où siègent le mathématic­ien Cédric Villani, le réalisateu­r Cédric Klapisch ou le promoteur Guillaume Poitrinal. L’avocate Patricia Lemoine, héritière du groupe Galeries Lafayette, l’a fait entrer dans le club des Global Young Leaders, qui réunit des ambitieux du monde entier. « C’est notre premier entreprene­ur social, dit-elle. C’est un excellent vendeur parce qu’il croit à ce qu’il fait et il va au bout de ses idées ! » Tant pis si elles partent dans tous les sens, d’un scénario de série télé (pour « Plus belle la vie ») à l’écriture d’un livre (« la Ruée des Licornes », coécrit avec Anne Rodier, aux Editions Lemieux)… Ses bailleurs de fonds adorent !

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