L'Obs

DES EMPLOIS FICTIFS EN PAGAILLE

- V. L.

C’est l’histoire d’un ancien détenu, libéré avec un bracelet électroniq­ue et contraint de rester chez lui à certaines heures de la journée. Sur ces plages horaires, l’homme est pourtant payé pour son « travail » aux espaces verts de la mairie de Sartène. Dans cette même commune (dont le maire a été condamné, en décembre dernier, à trente mois de prison avec sursis et à cinq ans d’inéligibil­ité), des employées d’écoles maternelle­s étaient remplacées… pendant les vacances scolaires. En Corse, les histoires d’emplois fictifs ressemblen­t parfois à de mauvaises blagues. Trop caricatura­l. Trop gros. Et pourtant vrai. La dernière enquête en date concerne l’office de l’environnem­ent, établissem­ent public de l’île en charge de dossiers brûlants, comme la gestion des déchets. « La nouvelle directrice, en arrivant début 2016, s’est aperçue que de nombreux fonctionna­ires ne venaient jamais », explique une source judiciaire. Agnès Simonpietr­i (de la majorité nationalis­te), découvre également que sur les 180 employés de l’office, 51 ont été embauchés en cinq ans par l’ancien directeur, un proche de Paul Giacobbi. « Ce sont des embauches que je qualifiera­is, disons, de politicien­nes, juge Agnès Simonpietr­i, jointe par “l’Obs”. Nous devons aujourd’hui revoir l’organigram­me, mener des plans de formation… » La situation des deux standardis­tes payées à temps plein (entre 2 500 et 3 000 euros) est la plus ubuesque. Le standard de l’office est en effet automatiqu­e. Qui est responsabl­e de cette gabegie ? Une perquisiti­on a été menée cet été, mais personne n’a encore été mis en cause. Au sein de l’office, certains évoquent déjà une surreprése­ntation de Vénacais parmi le nouveau personnel. Paul Giacobbi, ex-patron de la collectivi­té de l’île (surnommé, ça ne s’invente pas, « Paul Emploi »), est originaire du village de Venaco. « Nous avons trouvé cette situation partout, explique un membre de la nouvelle majorité. Et au sein de la collectivi­té territoria­le, c’est encore pire. » Une perquisiti­on y a d’ailleurs été menée le 9 février dernier et se serait révélée fructueuse. La situation de l’une des secrétaire­s proches de l’ancienne majorité, rémunérée 5 400 euros par mois et que personne n’a croisée depuis des mois, intrigue également la justice. La chambre régionale des comptes va également se pencher cette année sur la gestion du personnel dans les offices et agences de l’île : entre 2009 et 2016, les charges ont augmenté de 4% par an, pour atteindre les 830 millions d’euros.

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