Législatives Les acrobaties de NKM
Nathalie Kosciusko-Morizet espérait être au gouvernement Macron. Raté! Du coup, l’ancienne ministre de Sarkozy se concentre sur sa circonscription parisienne pour assurer son avenir
C’est un parachutage, négocié en plein vol, dont l’atterrissage s’annonce plus périlleux que prévu. En janvier, dans l’avion qui l’emmène au CES, le salon high-tech de Las Vegas, Nathalie Kosciusko-Morizet convainc François Fillon de lui offrir sa très convoitée circonscription parisienne – à cheval sur les 5e, 6e et 7e arrondissements de Paris –, bien plus sûre que celle du 14e où la députée de Longjumeau pensait initialement se présenter. A l’époque, la voie royale est tracée : à Fillon l’Elysée, à NKM un ministère et l’assurance d’un siège en or à l’Assemblée.
Mais rien ne s’est passé comme prévu et voilà l’« emmerdeuse », comme la qualifiait Chirac, contrainte à 44 ans de jouer une partie de son avenir politique. L’ancienne ministre des Transports a vu débouler le TGV Macron et s’est décidée à la dernière minute à tenter de sauter dans ce train en marche. Elle avait tout pour y monter : écolo, geek, bobo, libérale. Dans un premier temps, pourtant, elle résiste. Lorsqu’une vingtaine d’élus proches de Juppé ou de Le Maire se disent prêts à accepter la « main tendue » par le nouveau président, après la nomination d’Edouard Philippe à Matignon, elle n’est pas dans les premières signataires. Mais la fonceuse se ravise, se raccroche aussitôt à l’appel et fait savoir qu’elle emmène une centaine de ses parrains à la primaire. Difficile d’être plus claire : elle est prête à toper. « Elle est passée de la résistance à la collaboration zélée », ironise un élu.
Sans être payée de retour. Le mercredi matin, elle ne figure pas dans la short-list qu’Edouard Philippe soumet à l’Elysée. Son nom a-t-il circulé? Emmanuel Macron, ne la jugeant pas assez fiable, l’a-t-il écartée comme certains l’imaginent à droite? « Je n’ai rien demandé et on ne m’a rien proposé formellement », assure NKM à « l’Obs », reconnaissant qu’elle se serait « posé la question » si l’Education ou la Défense lui avaient été proposées. « Après l’annonce, elle était hystérique », assure un élu de l’hôtel de ville de Paris. Dans son parti, dont elle fut la numéro deux nommée par Sarkozy avant de rompre politiquement avec lui, sa mauvaise fortune réjouit : « Elle a brûlé tous ses vaisseaux. C’est la spécialiste mondiale de la trahison. Mais c’est la première fois qu’elle trahit et que cela ne marche pas ! » En prime, NKM risque aussi de perdre l’été prochain son poste de chef de file de l’opposition à Paris, qu’une partie de ses troupes lui conteste déjà.
En attendant, en trench-coat et accompagnée de ses deux enfants, elle fait campagne au marché bio et enchaîne les réunions d’appartement. A une cliente qui lui demande pourquoi elle n’est pas au gouvernement, elle répond franchement : « Je veux d’abord être élue, je veux mon indépendance. Et pas n’importe quel poste… » Manière de dire qu’elle n’exclut rien pour l’après-législatives. Aux électeurs de droite de la chic rive gauche, souvent séduits par les premiers pas de Macron, elle explique qu’elle votera ses réformes sur l’Europe ou l’Education, pas forcément celles sur la fiscalité où « ce n’est pas très clair ».
En face, ses adversaires l’accusent de jouer sur tous les tableaux. Ancien journaliste, Gilles Le Gendre se présente comme le seul candidat pro-Macron et croit en ses chances, puisque au premier tour son champion est arrivé à égalité avec Fillon dans la circonscription. Sa candidature, dit-il, est le signe que NKM ne bénéficie d’aucun traitement de faveur du nouveau président qui a, à l’inverse, choisi d’épargner d’autres élus LR... Est-ce, comme le croient certains, pour préparer le terrain à Paris à la future candidature du porteparole de La République en Marche Benjamin Griveaux? Ce n’est pas tout. A droite, le maire du 6e, Jean-Pierre Lecoq, s’est lancé en dissident. Il mise sur sa légitimité locale et sur l’hostilité suscitée par l’ancienne candidate à la mairie de Paris : « C’est incroyable, je découvre le nombre de gens qui détestent NKM. » Sans parler d’Henri Guaino, l’ami de Rachida Dati, la maire du 7e, qui s’est parachuté des Yvelines à la dernière minute. Pour un peu, NKM s’amuserait presque de ce « tir croisé » : « J’ai failli publier un communiqué : “Ne vous sentez pas tous obligés !” »