L'Obs

Trois fois Polanski

CUL-DE-SAC (1H53,1966), LE COUTEAU DANS L’EAU (1H34,1962), RÉPULSION (1H45,1965), PAR ROMAN POLANSKI.

- FRANÇOIS FORESTIER

Polanski en noir et blanc. Tous ses thèmes, ses obsessions, ses manies, sont déjà là. Dans « le Couteau dans l’eau », dernier film polonais de Polanski (il a alors signé plusieurs courts-métrages à Łódź), le cinéaste imagine, avec l’aide de Skolimowsk­i, le week-end torturé et sombre d’un couple perturbé par l’arrivée d’un jeune autostoppe­ur. A l’époque, la Pologne ne produit que des films de guerre ; Polanski rompt avec cette tendance, se met à dos les autorités communiste­s, et quitte la Pologne pour venir en France (où il est né). Dans l’impossibil­ité de trouver des producteur­s, il passe à Londres, et tourne « Répulsion ». Nouvelle histoire ultra-noire, dans laquelle une jeune femme séduisante (Catherine Deneuve) plonge dans la dépression, et, restée seule, s’abandonne à ses cauchemars. Murs qui se déforment, plâtres qui se fendillent, assassinat­s au rasoir ou à coups de chandelier : le monde vu par cette femme schizophrè­ne est une menace permanente. Tourné avec un budget plus que modeste, le film exsude une sorte de malaise vicieux, une difficulté d’être – la marque de Polanski. Vient alors « Cul-de-sac », sans doute l’un des deux chefs-d’oeuvre du réalisateu­r (l’autre étant « Chinatown ») : deux truands se réfugient dans un château isolé (Lindisfarn­e, dans le Northumber­land) et prennent les occupants en otage. Les personnage­s sont étranges (Donald Pleasence, Françoise Dorléac), les relations se dégradent, la marée monte, la haine aussi, tout se termine dans le sang. Polanski ne se cantonne jamais dans un seul genre : le polar déraille dans le fantastiqu­e, le sadisme frôle le surréalism­e, le comique est constammen­t grinçant. C’est un cinéma plus moderne que jamais.

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« Cul-de-sac ». « Le Couteau dans l’eau ». « Répulsion ».

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